Neneh Superstar est film est prenant et touchant. Nous sommes rapidement absorbés par le récit et son rythme bien dosé. À la rédaction, nous ne sommes pas vraiment fans de MAÏWENN (Marianne Belage), mais ici, elle crève l’écran et communique quelque chose d’intense et fragile à la fois. Il y a également l’incroyable Oumy BRUNI GARREL(Neneh) qui est sensationnelle, c’est une interview spontanée qui nous a poussé à découvrir ce film et à le défendre !
Entre classique, préjugés et rigidité au changement :
La réconciliation et la souffrance d’être hors des codes. C’est un peu de ça qui coule en fond de ce film. C’est cette envie de raccrocher les wagons entre le talent et les traditions ancestrales de la danse classique. Pourquoi certaines danseuses type africaines se retrouvent toujours mise à l’écart de l’élite de l’Opéra ? Même si l’on ressent durant tout le film l’envie de montrer le parcours du combattant de la jeune Neneh, on entend aussi cette mélodie de la souffrance du corps et du mental.
Faire de ses faiblesses une force, la danse devient une respiration.
La danse coule dans les veines de Neneh. Il ne faut jamais montrer que c’est difficile, il faut que cela devienne un automatisme. Et elle va s’y tenir, quand on la blesse, la brutalise, elle ne dit mot. On ne sait pas vraiment l’explication de cette attitude, est-ce pour ne pas quitter ce lieu mythique ? Est-ce pour ne pas être une balance et par solidarité ?

Être noir en banlieue n’est pas pareil qu’être noir parmi les élites des hautes sphères. En banlieue, tout est coupé de Paris. Il faut du courage, de la volonté et faire des sacrifices. Les gens ont tendance à préjuger des qualités des gens. On refuse certaines personnes dans le monde travail à cause de leur origine, couleur de peau ou milieu social, sous prétexte qu’elles ne pourraient pas adhérer aux valeurs de la société ou de l’établissement. Neneh va subir cela, malgré sa bonne volonté à faire preuve de cohésion et de solidarité, elle subit des moqueries et des pressions constantes.
La dualité à l’origine de l’exclusion de Neneh :
La directrice s’est francisée et vit dans le mensonge de ses origines, dans le déni. Elle voit en Neneh beaucoup d’elle et sait combien c’est difficile de vivre dans un milieu qui n’est pas le sien. Elle veut éviter cela à cette jeune prodige. Finalement, ce qui semble être du mépris est en réalité un besoin de se protéger de son passé et protéger Neneh de ce milieu.

L’immobilisme des valeurs ancestrales vs le talent et la méritocratie :
«J’ai dessiné le personnel de l’école de manière hyper réaliste. Chaque phrase prononcée est une phrase puisée dans une documentation approfondie. L’ouverture d’esprit de l’équipe enseignante est même respectée » explique RAMZI BEN SLIMAN. Dans ce film, tout s’inspire réellement des codes du monde de la danse et de l’opéra.
Il y a des règles, des codes. Il vaut mieux avoir le physique et du talent qu’uniquement du talent. Il faut en moyenne 8h par jour de danse. Seuls le prof de danse classique et le directeur croient en Neneh. Ses parents ont deux discours différents. Mais en grattant bien, on peut supposer que le directeur veut faire entrer de la diversité dans son opéra pour moderniser son image et faire un coup de com. Sa mère a peur que ce milieu qu’elle ne connaît pas soit dangereux pour sa fille, quant au père, il voit ici le moyen de sortir de sa condition sociale et surtout d’avoir accès à une éducation de qualité.
Le film traite des outsiders qui arrivent à dépasser les limites par leur force de conviction et leur talent :
Un peu comme dans la vie de tous les jours, il y a des outsiders qui vont arriver à faire des choses incroyables. Pour ne pas citer Mark Twain, certains ne savaient pas que c’était impossible et ils l’ont le fait. D’autres vont avoir des proches qui vont sans cesse les décourager en pensant que cette lubie ou passion n’est pas viable.

En France, nous sommes en retard par rapport à d’autres pays comme les USA, qui a vu en 2001 l’arrivée de Misty Copeland en tant que première soliste noire à l’American Ballet Théâtre.
Misty comme Neneh va subir la métamorphose du corps qui à l’adolescence change. Et malgré ses 45 kg (pour 1m57), on lui impose de perdre encore du poids afin de rentrer dans les critères de l’opéra et de la danse classique.
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25 janvier 2023 en salle / 1h 35min / Comédie dramatique, Drame, Comédie
De Ramzi Ben Sliman
Par Ramzi Ben Sliman
Avec Oumy Bruni Garrel, Maïwenn, Aïssa Maïga