Un film sur une startup 2.0 ça vous parle ? Avec l’essor du télétravail, Les 2 Alfred de BRUNO PODALYDÈS se positionne dans un contexte socio-économique parfait. Même si cette comédie reste drôle et vraie, elle est une belle satire d’une société ubérisée, où l’on vit pour nos enfants tout en nous cachant d’en avoir.
Une critique de la société
Ce film dénonce « la peur de perdre son Job », il faut bien noter l’usage du mot Job et non le mot travail. D’après la linguistique un job est interchangeable, un travail ne l’est pas. Quand on parle de vocation on utilise le terme travail ou métier, quant au terme Job, lui n’évoque que l’aspect alimentaire.
Alexandre (DENIS PODALYDÈS) n’a pas seulement besoin d’un job pour vivre et manger, il en a besoin pour sauver les apparences, il se doit de se prouver à lui-même, mais aussi à sa femme qu’il n’est pas uniquement un papa poule. L’idée de l’adultère responsable de cette rupture est un faux prétexte, cet homme trop lisse permet via cet adultère de prouver qu’il a une vie en dehors du foyer familial. Le vrai souci est sa dépendance maladive aux autres.
Cet ultimatum posé par le banquier et sa femme doit lui permettre de prouver qu’il peut subvenir à ses besoins et c’est là qu’on comprend le malaise de la société actuelle où nous vivons pressés et exploités pour répondre à une nécessité vitale d’avoir un job. Cet homme n’a pas de réelle vocation si ce n’est celle d’être un bon père.
À une autre époque trouver un métier était une longue démarche, car le choix d’un métier avait un impact sur le long terme, de nos jours on cherche avant tout un job permettant de payer les factures. Comme il est difficile d’avoir un job ou un travail, nous nous forçons à faire toujours plus. Les partons le savent et profitent du fait que nous n’avons aucune alternative. Il est d’ailleurs intéressant de voir comment se comporte un patron face à un employé qui a le choix, il est intéressant de voir que la dynamique change et qu’il est sans cesse dans la peur de vous perdre.
En face de cela il y a ce mec entrepreneur de lui-même, alias Arcimboldo (BRUNO PODALYDÈS), il n’a pas de vrai travail et fait plusieurs petits services qui lui rapportent 10-30 €. Il est la caricature de la société ubérisé, où l’on doit se battre pour avoir le droit d’être exploité. La scène où il se bat pour récupérer un drone est criante de vérité. De nombreux jeunes se battent chaque soir pour pouvoir embarquer les trottinettes laissées sur le trottoir des grandes villes.
Qui est le plus heureux finalement ? L’employé soumis ou l’indépendant qui coure après quelques euros ?

Toujours plus jeune
Ce film critique par la devise de cette entreprise l’idéologie du « Toujours plus jeune ». Certains sont comme des poissons dans l’eau, d’autres non. Un peu comme quand Séverine (SANDRINE KIBERLAIN) craque et dit ne plus supporter une société d’acronymes. Il y a tellement de sigle au quotidien que plus personne ne sait vraiment à quoi s’en tenir et se référer.
Il y a également cette tendance à tout changer, utiliser des mots compliqués et savant « One to One » pour simplement dire « Entretien », là où un Anglais dirait « a job interview », on comprend assez vite que les entreprises françaises ont cette capacité à vouloir parler anglais avec des mots qui ne veulent rien dire.
Cette envie d’être toujours plus jeune et toujours plus rapide est même risible, autant que cette tradition de faire des galettes à chacune des réunions de la boite. Nous avons l’impression d’être face à un patron figé dans une attitude de petit garçon. D’ailleurs tout dans la boite laisse penser à une grande garçonnière : des tables de baby-foot, des trampolines…. Même si cela semble absurde, plusieurs grandes sociétés dans le domaine des hautes technologies utilisent ces méthodes pour soi-disant laisser l’inspiration naitre.
The Box est comme une grosse crèche où des enfants terribles se battent le jouet à la mode, il y a aussi ce patron qui joue le tyran de la cour de récrée… On veut lui plaire donc on ment et on suit ses règles.
Ne pas vouloir d’enfant est finalement une rengaine, la peur que l’enfant devienne un obstacle à la réussite ? Ou simplement le fruit d’un esprit trop enfantin qui ferait une crise de jalousie à l’annonce de la naissance d’un enfant.
Fiche technique
- Titre original : Les Deux Alfred (ou Les 2 Alfred)
- Réalisation et scénario : Bruno Podalydès
- Assistant réalisateur : Quentin Janssen
- Directeur de la photographie : Patrick Blossier
- Supervision musicale : Frédéric Junqua
- Montage : Christel Dewynter, assisté de Mia Collins
- Décors : Wouter Zoon
- Costumes : Dorothée Guiraud
- Ingénieur du son : Laurent Poirier
- Mixage : Cyril Holtz
- Créateur de l’affiche française : Charles Berberian
- Production : Pascal Caucheteux
- Sociétés de production : Why Not Productions, Arte, Canal+, OCS
- Sociétés de distribution : UGC ; O’Brother Distribution (Belgique), Xenix Filmdistribution (Suisse romande)
Distribution
- Denis Podalydès : Alexandre Duveteux
- Sandrine Kiberlain : Séverine Cupelet
- Bruno Podalydès : Arcimboldo
- Luàna Bajrami : Suzie
- Yann Frisch : Aymeric
- Leslie Menu : Sarah
- Michel Vuillermoz : le banquier
- Jean-Noël Brouté : le ventouseur de chez Wyn Wyn
- Isabelle Candelier : la femme d’affaires
- Philippe Uchan : le chauffeur épuisé du VTC
- Patrick Ligardes : le Maire de Croisseuil
- Florence Muller : Gisèle, le femme du maire et première adjointe de Croisseuil
- Vanessa Paradis : Albane
- Samuel Benchetrit : un passager d’Autoclock
- Gabor Rassov : un passager d’Autoclock
- Elodie Huber : La puéricultrice
- Georges Podalylydès : le fils d’Alexandre
- Léa Barbaroux : Ernestine
- Nino Podalydès : Clément, le fils du maire
- Jules Trouillard : Jasmin
Une réflexion sur “Les 2 Alfred”