Orange Road, connue en France sous le titre Max et compagnie, a marqué toute une génération de lecteurs et de téléspectateurs à la fin des années 80 et au début des années 90. Publiée initialement en manga par J’ai lu sous le titre Les Tribulations de Orange Road et rééditée plus tard par Tonkam, cette œuvre a su séduire par son mélange de comédie romantique et de fantastique. Toutefois, un examen plus approfondi et adulte révèle des aspects de l’histoire qui peuvent sembler beaucoup plus troublants qu’innocents.
Le manga et ses adaptations
Créée par Izumi Matsumoto, Kimagure Orange Road a été publiée pour la première fois en 1984 dans le magazine Weekly Shōnen Jump. Le manga raconte l’histoire de Kyosuke Kasuga, un adolescent doté de pouvoirs psychiques qui déménage fréquemment avec sa famille pour éviter que leurs capacités ne soient découvertes. À leur arrivée dans une nouvelle ville, Kyosuke rencontre Madoka Ayukawa et Hikaru Hiyama, deux filles qui changeront sa vie. La série explore les relations complexes et triangulaires entre Kyosuke, Madoka, et Hikaru, tout en intégrant des éléments de science-fiction avec les pouvoirs surnaturels de Kyosuke.
Le succès du manga a conduit à une adaptation animée diffusée de 1987 à 1988, ainsi qu’à plusieurs films et OAV (Original Video Animation) qui ont permis de prolonger l’expérience pour les fans. Parmi les adaptations les plus notables, on trouve les films Shin Kimagure Orange Road: Summer’s Beginning (1996) et Kimagure Orange Road: I Want to Return to That Day (1988), qui approfondissent l’univers et les personnages de la série.
Un changement de perspective avec l’âge
À l’époque de sa sortie, Orange Road était perçue comme une série mignonne et divertissante, avec des moments drôles et émouvants. Les aventures romantiques de Kyosuke, sa maladresse, et les situations comiques causées par ses pouvoirs psychiques ont su captiver un jeune public. Cependant, un regard adulte et rétrospectif sur l’œuvre révèle des aspects beaucoup plus problématiques.
Kyosuke – Indécis et peine de coeur
Kyosuke, bien que présenté comme un personnage sympathique, exhibe des comportements qui peuvent être interprétés comme toxiques. Sa tendance à hésiter entre Madoka et Hikaru, sans jamais vraiment prendre de décision claire, engendre une dynamique malsaine où les sentiments des deux filles sont manipulés. Cette indécision chronique peut être vue comme une forme de harcèlement émotionnel, où Kyosuke profite de l’attention et de l’affection des deux filles sans réellement assumer la responsabilité de ses actions.
Kyosuke ne veut pas perdre Madoka ni sa meilleure amie, et cette dynamique complexe se manifeste tout au long de l’histoire. Madoka est dépeinte comme une jeune femme forte et indépendante, remplie de tendresse pour ceux qu’elle aime. Elle se bat avec acharnement pour subvenir à ses besoins, malgré des parents musiciens reconnus vivant aux USA. Refusant de dépendre de qui que ce soit, elle choisit de vivre seule, affirmant ainsi son autonomie.
Ce trait de caractère crée un contraste saisissant avec Kyosuke, dont l’indécision et l’incapacité à se positionner clairement engendrent des tensions. Madoka, par son comportement protecteur envers sa jeune meilleure amie de 14 ans, montre une autre facette de sa personnalité. Elle laisse les autres croire que cette amie est sa petite amie, une façade destinée à éloigner les menaces potentielles. Cependant, cette situation crée une tension palpable. La jeune fille, bien que silencieuse, ressent de l’agacement face à l’hésitation persistante de Kyosuke.
Kyosuke, de son côté, semble entretenir cette ambiguïté pour continuer à graviter autour de Madoka et sa meilleure amie. Son comportement démontre un mélange de peur de perdre ces deux femmes et une incapacité à affirmer ses propres sentiments. Cette indécision de Kyosuke ne fait qu’amplifier la complexité de leurs relations, rendant chaque interaction chargée de non-dits et de frustrations silencieuses.
En regardant l’animé en VO nous avons plus de scène non censurée et on comprend rapidement l’écart entre la version française réduite de plusieurs minutes (en moyenne 10-12 minutes par épisode). Quant à Kyosuke dans la version originale, il est moins timide, moins ambiguë. Il a tendance à parler un peu plus à Madoka et on perçoit beaucoup plus le trouble dans l’esprit de la jeune femme.
Un héritage complexe
Cette série reste une série emblématique qui a marqué l’histoire du manga et de l’animation. Son influence est indéniable, et elle a ouvert la voie à de nombreuses autres œuvres du même genre. Cependant, il est essentiel de revisiter ces œuvres avec un œil critique, en reconnaissant à la fois leurs qualités artistiques et narratives, et les aspects problématiques qu’elles peuvent contenir.
En fin de compte, Max et compagnie un peu comme Nicky Larson pour City Hunter représente un miroir de son époque, avec ses normes sociales et ses représentations culturelles. Pour les fans de longue date, cela peut être un choc de redécouvrir une série adorée sous un nouveau jour, mais cela offre également l’opportunité d’une réflexion plus profonde sur la manière dont la culture populaire influence et reflète les attitudes de la société.
En revoyant cette série, nous pouvons apprécier la complexité de ses personnages et de ses intrigues, tout en étant conscients des messages implicites qu’elle véhicule. C’est un exercice de nostalgie et de critique qui enrichit notre compréhension de l’œuvre et de l’époque à laquelle elle appartient.
De plus, plusieurs personnages masculins secondaires de la série manifestent des comportements encore plus problématiques. Le harcèlement perpétuel des jeunes lycéennes, les comportements intrusifs et souvent agressifs envers les femmes, et le manque de respect général pour leur consentement sont des thèmes récurrents qui passent inaperçus pour un jeune public, mais qui sont flagrants pour un lecteur ou un spectateur adulte. Ces comportements, banalisés dans le contexte de la comédie romantique de l’époque, prennent une toute autre dimension lorsqu’ils sont réévalués avec une compréhension moderne des dynamiques de pouvoir et de respect des limites personnelles.
L’adaptation française est tirée de la version italienne
La version française est une adaptation directe de la version italienne, un phénomène courant dans les années 90. En raison de l’appartenance de La Cinq au groupe italien Télévisée, la série a conservé les mêmes codes et génériques que dans son pays d’origine, optimisant ainsi les coûts et maximisant les profits. Ce procédé était aussi utilisé pour d’autres séries animées, comme Olive et Tom et les adaptations de Lupin en France, qui reprenaient les génériques italiens. Cette approche permettait aux chaînes françaises de bénéficier de la popularité des versions originales tout en réduisant les frais de production pour les adaptations locales.
Max et Compagnie : L’arrivée en France via le Club Dorothée
La série est arrivée en France dans les années 90, grâce au phénomène du Club Dorothée. L’émission, déjà populaire au Japon pour sa romance légère mêlée de fantastique, a trouvé un nouveau public en France, où elle est rapidement devenue culte. Le Club Dorothée, qui avait le talent d’importer les meilleures séries d’animation japonaise, a introduit cette série sous le titre « Max et Compagnie, » marquant le début de son succès en France. La série suit les aventures de Max, un adolescent doté de pouvoirs psychiques, pris dans un triangle amoureux avec Sabrina et Pamela. La dynamique entre les personnages, combinée à l’attrait des pouvoirs surnaturels de Max, a captivé les jeunes téléspectateurs français, faisant de la série un incontournable.
Doublage et Évolution : De AB Cartoons à Manga la Chaîne TV – Le générique Français-Italien de la série
Le chemin de Max et Compagnie en France n’a cependant pas été sans embûches. Lors des premiers épisodes diffusés, des erreurs de doublage notables ont été commises. Max, le personnage principal, est parfois appelé « Johnny, » un nom issu de la version italienne du dessin animé. Ces erreurs, bien que rapidement corrigées, sont devenues une anecdote amusante pour les fans. Après son passage au Club Dorothée, Max et Compagnie a continué à être diffusé sur AB Cartoons, une chaîne spécialisée dans l’animation, avant de trouver une nouvelle maison sur Manga, la chaîne TV dédiée aux animes.
Là, la série a bénéficié d’une nouvelle génération de fans, consolidant sa place dans la culture populaire française. Le parcours de « Max et Compagnie » en France est emblématique des défis et succès de l’importation d’animes dans les années 90, un âge d’or pour les séries animées japonaises en France.
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Super serie. J’en garde un incroyable souvenir. La série a une charge émotionnelle assez forte et le premier film vient tout renverser. On est totalement désorienté en tant que spectateur. On ressent la detresse des personnages. On voulait que cela finisse avec le couple Madoka et Kyosuke, mais en même temps, on ne veut pas blesser Hikaru a ce point. Bref, on ne sait pas si on est heureux ou non a la fin. Ca donne une sensation de laisser une terre brûlée derrière soi. Mais c’est finalement le plus réaliste. Il n’y avait pas de compromis possible.
Merci pour cet article bien écrit !
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Merci à toi, ton podcast est incroyable
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