She will est le petit ovni cinématographique à ne pas manquer. La réalisatrice Charlotte Colbert joue avec les codes du genre fantastique dès l’ouverture du film.
À base de plans inversés par l’axe horizontal, où l’on voit un train entrer dans la brume ou encore le jeu sur l’idée du masque que l’on porte sans cesse et en public. La réalisatrice va poser les bases d’un film sur les sorcières, mais où son langage cinématographique bien maitrisé va peu à peu mener le spectateur ailleurs.
Si le langage développé autour du corps est très présent, il fait écho à la grande hystérie ou l’imagerie populaire de la possession, deux sujets qui fascinent le public depuis la création du genre fantastique. Ici, la maladie et la dépression sont les deux éléments clés motivant la mise en avant du corps, mais ce n’est pas tout, la réalisatrice s’amuse à jouer sur les oppositions et le dit clairement : il y a ce corps qui perd peu à peu ses caractéristiques de féminité à cause de la maladie et le corps de cette jeune infirmière qui se cache dans un androgynisme suggéré par l’actrice sur le déclin.

La réalisatrice met en avant une photographie basée sur des jeux d’opposition et de contrastes. Même s’il parle énormément de la notion du Bien et du Mal, on sent que Charlotte Colbert veut mener le public dans un autre monde et découvrir d’autre perspective.
Ici, l’usage d’un plan inversé par son axe horizontal a une autre signification. En effet, quand on regarde la représentation des sorcières qui est proposé dans ce film, elles ne font pas peur, les vrais monstres ce sont les hommes qui les condamnent au bucher.
Les oiseaux s’en vont comme pour annoncer le danger, mais où est-il ce réel danger ? C’est avec une idée que la terre peut tout soigner, que la Nature possède la force des victimes de cette chasse aux sorcières. Charlotte Colbert semble progressivement pointer du doigt les mâles abjects et met en place une analogie entre les victimes de viol et les sorcières que l’on pourchassait.
Si l’esprit de la nature est là, il est noir et agit comme un parasite envahissant.
La réelle force de ce film réside dans ce doute planant !
On ne sait jamais dans ce film où se situe la part de l’onirisme et du réel ; bien qu’il y ait beaucoup d’éléments qui tendent vers l’un et l’autre. Une vision plus cartésienne pencherait pour un somnambulisme produit par l’épreuve psychologique et les médicaments.
Quant au contexte géographique et social, ils vont alimenter la construction du paranormal, qui lui-même se nourrit des peurs de tout à chacun. La réalisatrice alimente tout notre imaginaire et nous dévoile un endroit vivant, où les sons sont très organiques et semblent pousser nos sens à leur paroxysme.

La femme et les sorcières, vers le chemin de la guérison :
Le film parle surtout du combat des femmes contre les hommes. Il y a plusieurs personnes qui cherchent à être guéries des blessures. On a cette actrice représentant l’hyper féminité qui se retrouve démunie de ses attributs féminins. Il y a ces sorcières qui pour leurs connaissances et leurs modes de vie ont été exterminées. Ce lieu est en quelque sorte une forme de purgatoire, un endroit où chacun peut guérir de ses démons et du passé.
______________
Notre avis : Surprenant, le mythe de la sorcière recontextualisé,
dans une atmosphère fantastique et thriller psychologique.
30 novembre 2022 en salle / 1h 35min / Thriller, Drame, Fantastique
De Charlotte Colbert
Par Kitty Percy, Charlotte Colbert
Avec Alice Krige, Kota Eberhardt, Rupert Everett
Copyright Slug Love Films Ltd 2022