Sacré-Cœur, le documentaire de Sabrina et Steven J. Gunnell, explore l’histoire d’une dévotion universelle née à Paray-le-Monial avec Sainte Marguerite-Marie Alacoque. Entre mystique, Eucharistie et témoignages modernes, le film révèle la puissance actuelle d’un cœur brûlant d’amour.
Avec Sacré-Cœur, Sabrina et Steven J. Gunnell plongent dans l’histoire fascinante du Sacré-Cœur, en reliant l’intime et l’universel. Ce documentaire de 1h35, produit par Krea Film-Makers et distribué par Saje Distribution, sortira au cinéma le 1er octobre 2025, au terme du jubilé des 350 ans des apparitions à Paray-le-Monial. Plus qu’un film religieux, c’est une enquête sur une spiritualité qui a traversé les siècles, inspiré des millions de croyants et suscité autant de ferveur que de débats. Au centre, une femme hors normes : Sainte Marguerite-Marie Alacoque, mystique incomprise de son temps, devenue l’initiatrice d’un culte désormais universel. Le film explore ce cœur brûlant d’amour révélé en 1673, toujours vivant aujourd’hui dans les communautés, les familles et les expériences intérieures, posant la question essentielle : que nous dit encore le Sacré-Cœur en 2025 ?
Un film sur une figure méconnue
Le film de Sabrina et Steven J. Gunnell entremêle docu-fiction et témoignages pour retracer l’histoire du Sacré-Cœur de Jésus, depuis les apparitions à Paray-le-Monial jusqu’à son actualité dans le monde contemporain. La narration s’appuie sur des historiens, des théologiens, des prêtres, mais aussi sur des témoins modernes, parfois inattendus, comme une ancienne footballeuse professionnelle ou un ancien délinquant converti. Au-delà du récit spirituel, Sacré-Cœur interroge les fractures culturelles et religieuses : pourquoi cette dévotion a-t-elle suscité tant de méfiance au XVIIᵉ siècle ? Comment la France marquée par le jansénisme a-t-elle accueilli une mystique de l’amour et de la réparation ? Le film met aussi en lumière la continuité de ce message à travers l’Eucharistie, la liturgie et la vie des sanctuaires, notamment à Paray-le-Monial, lieu où tout a commencé. Entre mémoire, foi et expérience contemporaine, ce documentaire redonne chair à une spiritualité que beaucoup croyaient réservée au passé.

Un récit sur une femme hors normes
Sainte Marguerite-Marie Alacoque, née en 1647, apparaît dans l’histoire religieuse comme une figure à la fois fragile et indomptable. Issue d’une famille modeste, entrée chez les visitandines à Paray-le-Monial, elle porte dès son jeune âge une santé précaire, marquée par la maladie et des crises qui fragilisent son image auprès de ses contemporains. Pourtant, c’est à travers cette faiblesse que surgit une force singulière : des visions mystiques du Christ, qui lui révèle son Cœur brûlant d’amour pour l’humanité. Ces révélations, reçues entre 1673 et 1675, sont d’une audace bouleversante : Jésus lui confie non seulement son intimité divine, mais aussi une mission — instaurer une fête en l’honneur de son Cœur, source de consolation et d’amour.
Mais Marguerite-Marie n’est pas immédiatement accueillie comme une sainte. Son langage affectif, nuptial même, tranche avec la rigueur théologique dominante. Elle parle du Christ comme d’un époux qui brûle de passion, une approche que les jansénistes, influents en France, rejettent violemment. Dans ce climat de méfiance, certains confesseurs la jugent hystérique ou hallucinée, tandis que d’autres, comme le jésuite Claude La Colombière, la reconnaissent comme prophète. Cette ambivalence explique pourquoi son témoignage a longtemps semblé « peu crédible » aux yeux d’une partie de l’Église.
Pourtant, le temps donnera raison à la visitandine. La fête du Sacré-Cœur est instituée, son culte s’étend rapidement, et Paray-le-Monial devient un haut lieu spirituel. Canonisée en 1920, elle est désormais reconnue comme une figure majeure de la spiritualité moderne. Le documentaire rappelle combien Marguerite-Marie, loin des portraits figés, incarne une révolution spirituelle discrète : faire de l’amour de Dieu, concret et brûlant, le centre de la vie chrétienne. Sa mémoire demeure encore méconnue du grand public, mais sa voix, fragile et ardente, traverse le temps pour rappeler qu’aimer et réparer sont les deux gestes fondamentaux de la foi.

Le Sacré-Cœur et sa place dans la chrétienté
Le Sacré-Cœur, tel qu’il a été révélé à Marguerite-Marie, ne peut être séparé du mystère de la croix. Dans la tradition chrétienne, ce Cœur transpercé symbolise à la fois la souffrance rédemptrice et l’amour infini offert à l’humanité. Le documentaire rappelle que la dévotion au Sacré-Cœur n’est pas un culte secondaire, mais une clé de lecture de l’Eucharistie : la Cène, premier acte de communion, institue ce lien où le pain devient Corps, et où l’on accueille l’amour de Dieu en recevant l’hostie. En communiant, le fidèle entre dans le Sacré-Cœur, centre vivant de l’alliance entre Dieu et les hommes.
La réparation devient alors centrale : réparer les offenses faites à l’amour divin, ce n’est pas d’abord un geste moral, mais une réponse d’amour. « Rendre amour pour amour », disait le père Joël Guibert, intervenant du film. Le Sacré-Cœur devient un appel à la compassion active, qui dépasse le rituel pour devenir une manière de vivre : se consacrer, consoler, se donner. Dans cette perspective, le culte du Sacré-Cœur s’inscrit dans une tradition catholique qui conjugue le sensible et le théologique, en réconciliant les dimensions du corps, du cœur et de l’âme.
La dimension universelle du Sacré-Cœur est aussi rappelée : il s’adresse à chaque personne, indépendamment des cultures et des époques. En ce sens, il a marqué l’histoire de la France mais aussi celle du catholicisme mondial, inspirant des congrégations, des ordres missionnaires et des mouvements populaires. Dans une Église souvent traversée par les tensions doctrinales, le Sacré-Cœur demeure un symbole d’unité, rappelant que la foi chrétienne ne repose pas seulement sur des dogmes abstraits, mais sur un amour incarné.
Un documentaire à la croisée de la Philosophie et la Théologie
Le film s’appuie sur une pluralité de voix qui en renforcent la portée : Clémentine Beauvais (écrivaine), Père Étienne Kern (recteur de Paray-le-Monial), Maximilien Ambroselli (historien de l’art), Vinz Le Mariachi (musicien missionnaire), Zoé Müller (ancienne footballeuse professionnelle), Alicia Beauvisage (missionnaire), Louis Boufiard (auteur), Arnaud Bouthéon (responsable associatif), Père François Potez (prêtre et formateur), Père Martin Pradère (missionnaire), Rodrigue Tandu (converti), Jean-Marc et Sylvie Laniesse (témoins laïcs), Mère Marie-Jean (abbesse), Sœur Laetitia Trémolet de Villiers (fondatrice de congrégation). Tous apportent un éclairage singulier sur la puissance du Sacré-Cœur. Cette richesse se prolonge à travers des lieux emblématiques – de Paris à Paray-le-Monial en passant par Avignon, Angers, Nantes et Annecy – qui inscrivent le récit dans une géographie spirituelle et culturelle bien réelle. L’ancrage historique demeure essentiel, avec les trois apparitions de 1673, 1674 et 1675, et le message transmis en trois dimensions claires : un cœur passionné d’amour, la réponse insuffisante des hommes et l’appel à réparer par une fête. Enfin, la trajectoire des réalisateurs, marquée par des œuvres fortes comme Une seule chair ou la trilogie Eternam, mais aussi par leur livre Objectif Dieu, confère à ce projet une continuité qui dépasse le simple documentaire pour s’affirmer comme une véritable démarche de transmission.
Le documentaire élargit enfin la réflexion à des perspectives théologiques et spirituelles plus vastes. La figure de saint Longin, le soldat qui perça le flanc du Christ et devint, selon la tradition, le premier témoin du mystère du Cœur transpercé, rappelle que la foi naît souvent du paradoxe : la blessure devient source de lumière. Les témoignages contemporains, qu’ils viennent d’artistes, de missionnaires ou d’anciens marginaux, montrent que le Sacré-Cœur n’est pas une dévotion figée, mais une expérience vivante, capable de transformer les existences les plus éloignées. Le film rappelle aussi que, dans l’histoire chrétienne, les révélations privées comme celles de Marguerite-Marie n’ajoutent rien à la Révélation, mais orientent vers une compréhension plus intime de l’amour divin. Enfin, à travers le contraste entre la rigueur janséniste et la tendresse mystique du Sacré-Cœur, le film propose une leçon toujours actuelle : la foi chrétienne n’est pas d’abord une affaire de règles, mais une rencontre brûlante avec un Dieu qui aime et qui se laisse aimer.
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1 octobre 2025 en salle | 1h 35min | Documentaire, Drame
De Sabrina Gunnell, Steven J. Gunnell |
Par Sabrina Gunnell, Steven J. Gunnell
Avec Grégory Dutoit, Julie Budria, Sabrina Gunnell
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Merci pour cette critique/analyse complète de ce docu-fiction. Pour ma part, j’ai bien aimé. On sent un manque de moyens dans la réalisation, mais les réalisateurs arrivent à faire avec ce qu’ils ont pour que le résultat soit visuellement bien. Le côté historique est intéressant, de même que les différents témoignages. Ça m’a donné envie de me pencher davantage sur le sujet, en tout cas.
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Merci pour ce commentaire !
De nos jours, on n’en reçoit plus énormément par rapport au nombre de visiteurs.
Merci de votre visite, je vais faire un tour également sur votre site.
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