Elise Girard nous plonge dans un Japon captivant, dans le choc des cultures et aussi un apprentissage du deuil et du retour à la vie. Un film à la fois hypnotique et poétique avec une Isabelle Huppert touchante et un Tsuyoshi Ihara charismatique.
Le Japon royaume des différences culturelles, des manières et la vision du monde. En chaque chose réside une essence et du sacré. Comme le révèle le shintoïsme, l’une des religions traditionnelles de l’archipel, centrée sur le culte des kami, des esprits ou des divinités présents dans la nature, les ancêtres et les éléments naturels. Elle met l’accent sur le respect et la vénération des forces spirituelles et des lieux sacrés. Ici, Sidonie vit dans une forme de négation du passé et d’elle-même. Elle n’écrit plus, car n’a pas envie de se répéter et les traumatismes de la perte de son époux et de sa famille, lui fait une forme de blocage.
Vivre avec ses fantômes – Le Japon, lieu idéal pour essayer de faire son deuil et dire adieu à ces êtres.
Dans la culture japonaise, les fantômes et le deuil occupent une place prépondérante, reflétant une relation intime entre les vivants et les défunts. Vivre avec ses fantômes est une pratique profondément ancrée dans la société japonaise, offrant un moyen de faire son deuil et de maintenir un lien avec les êtres chers disparus. Les traditions japonaises valorisent la coexistence harmonieuse entre les vivants et les esprits, illustrée par le fait que ces derniers sont considérés comme mangeant et vivant parmi nous.
Ce lien entre les deux mondes est souvent vu comme un processus de guérison, permettant de lever les résistances et les refoulements liés à la peur de la mort et à la notion de mortalité. Dans le récit de l’autrice, le retour inattendu de son mari décédé agit comme un catalyseur, l’aidant à affronter ses propres craintes et à revitaliser sa vie parmi les vivants. Ainsi, cette interaction avec les fantômes joue un rôle crucial dans le processus de deuil au Japon, offrant aux individus un chemin vers la résilience et l’acceptation.

À la source de ce scénario, un repas chez une amie japonaise, qui l’a invitée chez sa mère pour partager un repas. À sa grande surprise, la table était mise pour quatre personnes, et elles étaient effectivement quatre à dîner. Le quatrième convive était le mari décédé de la mère de son amie, présent sous forme de fantôme. Pour la mère, ce fantôme était un moyen d’apaiser sa douleur et était perçu comme tout à fait normal par ceux qui l’entouraient. Cette expérience a profondément influencé la vision d’Élise Girard sur les fantômes dans le cinéma japonais et l’a inspirée à créer un personnage de fantôme apaisant et cool pour son film.
Les fantômes sont au cœur de la culture pop japonaise, et l’influence du shintoïsme a profondément modelé l’art et la perception de la vie et de la mort au Japon.
Les fantômes occupent une place de choix dans la culture populaire japonaise, s’immisçant dans l’art, le cinéma, la littérature et les jeux vidéo. Ces représentations spectaculaires trouvent leurs racines dans les croyances shintoïstes. Dans le shintoïsme, la frontière entre le monde des vivants et celui des esprits est poreuse, permettant aux fantômes de se manifester et d’interagir avec les êtres humains.

Cette conception unique de la vie et de la mort a profondément influencé l’art japonais, en le dotant d’une esthétique mélancolique et d’une sensibilité particulière aux thèmes de la transience et de l’éphémère. On peut citer Le Voyage de Chihiro ou encore plusieurs films d’animation tels que Suzume, utilisant de divers moyens pour reconnecter les Hommes avec leurs ancêtres. Les représentations des fantômes dans la culture pop reflètent cette perception shintoïste, dans laquelle les esprits errants peuvent être à la fois effrayants et mélancoliques. Comme pour rappeler la fragilité de la condition humaine et la nécessité d’accepter l’impermanence de la vie.
L’influence du shintoïsme a modelé non seulement l’art japonais, mais aussi la façon dont les Japonais perçoivent et célèbrent la vie et la mort. À travers Sidonie au Japon on utilise la mort comme moyen d’aimer à nouveau la vie, même si le temps est assassin et emporte avec lui les rires des enfants.
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3 avril 2024 en salle | 1h 35min | Drame
De Élise Girard |
Par Élise Girard, Sophie Fillières
Avec Isabelle Huppert, Tsuyoshi Ihara, August Diehl
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2 réflexions sur “Sidonie au Japon, une belle leçon sur la vie et la mortalité”