Le film se déroule à Yanji, une ville au nord de la Chine, près de la frontière coréenne. Haofeng, venu de Shanghai pour un mariage, se sent un peu perdu. Il rencontre Nana, une guide touristique, et son ami cuisinier Xiao. Leur rencontre intense les confronte à leurs histoires et secrets, dégelant leurs désirs au fur et à mesure, tout comme les paysages enneigés du Mont Changbai.

Des Hommes perdus et des éléments arides :

L’image de la glace joue un rôle majeur dans le film, symbolisant la rapidité des relations qui se forment et se brisent. Un peu comme la glace, elles semblent solides, mais fondent progressivement, car elles ne sont pas faites pour durer. Avez-vous remarqué que selon le contexte et le lieu, deux personnes pourront être soit très proches, soit rester des étrangers. Ces relations sont un peu comme ces glaçons subissant un changement d’état selon les milieux.

Les paysages rappellent les peintures chinoises traditionnelles, ajoutant une dimension artistique au récit. Et apportent encore plus de force à ce récit contemplatif où le réalisateur laisse le temps au temps, laisse les paysages avaler ses personnages. On a l’impression d’être totalement déconnecté du temps, on perçoit des obligations personnelles pour chacun des protagonistes, mais ils trouvent le temps de sortir et de marcher pour sortir de la monotonie du quotidien déjà très frustrant.

Des âmes perdues dans un milieu enclavé entre les montagnes et la ville :

Le film explore des thèmes de liberté, d’identité et de relations, avec des protagonistes étrangers qui se lient dans un endroit semi-étrange, reflétant l’intérêt du réalisateur pour les relations interculturelles.

Il est intéressant de voir comment le réalisateur arrive à parler de la crise identitaire et l’idée d’être loin de chez soi. Nous sommes dans un itinéraire de trois jeunes réunis dans un même lieu, où leurs brisures personnelles vont peu à peu les réunir.

La fuite pour essayer de se reconstruire

L’un fuit sa famille en se réfugiant dans les études, un autre travaille dur pour l’entreprise familiale, et la jeune femme qui est au cœur de ce trio vit une forme de fuite de sa blessure physique.

Le réalisateur parvient à sublimer la relation aux corps à travers différentes scènes d’amour, dont l’une, dans la douche dont beaucoup est suggéré. On ne sait pas trop comment qualifier ce trio, on sent qu’ils se mettent ensemble pour essayer de combler leur vide intérieur et aussi oublier la source de leur mal-être.

À côté de la sublimation du corps, il y a aussi la thématique des larmes qui a une certaine place. Le jeune guide et l’étudiant à maintes reprises vont pleurer. Ces deux personnages se ressemblent dans leurs blessures Quant au troisième membre de ce trio, il est beaucoup plus complexe. Il est d’origine coréenne et semble vivre à contrecœur la reprise de l’entreprise familiale. Il aspire à plus et ne sait pas trop comment se positionner par rapport à Nana (Zhou Dongyu). C’est un être qui parait toujours donner sans jamais rien exiger en retour. Il paie les dépenses de cet étranger, avance de l’argent pour Nana et s’occupe des plus jeunes de sa famille. Il est comme éteint, en mode automatique, en attente d’un signe ou quelque chose qui pourrait lui insuffler le sens de la vie.

Quelques mots sur la construction du film :

Le réalisateur a créé ce film suite à une crise existentielle après deux ans de confinement. Il voulait sortir de sa zone de confort, réalisant un film dans un lieu et un climat inconnus, capturant l’esprit de la jeunesse chinoise. Le résultat a été libérateur et spontané, une lettre d’amour à la jeunesse chinoise.

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22 novembre 2023 en salle / 1h 40min / Drame
De Anthony Chen
Par Anthony Chen
Avec Zhou Dongyu, Liu Haoran, Chuxiao Qu
Titre original Ran dong

Quelques mots sur Yanji

Yanji est une ville située dans la province du Jilin en Chine, se trouve à proximité de la frontière nord-coréenne, ce qui en fait une ville stratégique et un centre économique important. Son emplacement géographique, à seulement quelques kilomètres de la Corée du Nord, a contribué à une forte influence de la culture coréenne dans la région. Une importante population coréenne vive à Yanji. Cette immersion dans la culture coréenne est évidente dans la cuisine locale, les festivals et les traditions, créant ainsi une atmosphère unique où les deux cultures se fusionnent harmonieusement.