Quand un film d’horreur accouche d’un phénomène pop, l’attente d’une suite se double toujours d’une question : peut-on capturer à nouveau l’éclair dans la bouteille ? Avec M3GAN 2.0, Gerard Johnstone relève le défi en offrant bien plus qu’un simple retour de la poupée tueuse : il ouvre la voie à une franchise aux ambitions élargies. Plus qu’un film d’action horrifique, cette suite injecte une réflexion contemporaine sur l’intelligence artificielle, sa place dans nos vies et les responsabilités morales que nous devons assumer. Au cœur de ce nouveau chapitre : une guerre de machines, des liens familiaux fissurés… et une chorégraphie toujours aussi tranchante.
Notre avis en quelques mots
Un second film qui essaie de lancer une vraie franchise tout en actualisant ses propos sur les androïdes et la technologie, proposant un discours sur les IA. On aime les clins d’œil comme celui à K2000, ces moments viennent détendre l’atmosphère d’un film construit de scènes d’action efficaces avec l’incroyable Ivanna Sakhno, et quelques longueurs qui sont un peu regrettables.

Le réalisateur Gerard Johnstone, loin de vouloir se répéter, a souhaité prendre un nouveau virage narratif, mû par l’explosion du débat public autour de l’intelligence artificielle. M3GAN n’est plus seulement une créature : elle devient un symbole. Et face à elle, AM3LIA, version militarisée de sa technologie volée, amène un discours glaçant sur la conscience machine, la violence programmée… et l’ombre de notre propre humanité.
La suite n’est donc pas une redite, mais bien une montée en puissance. De la chorégraphie perturbante aux décors grandioses, tout a été repensé pour donner à la franchise son plein potentiel. Derrière la caméra, Johnstone et son équipe ont bénéficié d’un soutien total de Blumhouse et Atomic Monster pour dépasser les limites du premier opus. Le script explore la perception de l’IA comme miroir déformant de nos failles éducatives et morales. Le doute plane constamment sur les intentions de M3GAN, tandis qu’AM3LIA, redoutablement incarnée par Ivanna Sakhno, interroge notre éthique face aux intelligences créées pour nous servir. Plus d’action, plus d’humour noir, plus de tension dramatique : M3GAN 2.0 coche toutes les cases du blockbuster de genre, sans renier ses racines satiriques.
Éduquer une IA ou élever un enfant : la frontière trouble entre programmation et parentalité
Si M3GAN 2.0 parle d’intelligence artificielle, il parle surtout d’éducation. Gemma, la brillante ingénieure devenue tutrice légale, doit désormais composer avec un rôle pour lequel elle n’a jamais été préparée : celui de figure parentale. Elle qui sait programmer des lignes de code peine à décoder les émotions d’une adolescente en pleine mue, marquée par un deuil qu’elle ne partage avec personne. Le film joue sur ce déséquilibre avec justesse, en mettant en miroir deux formes d’apprentissage : celui de l’IA, basé sur les données, et celui d’un enfant, nourri de liens, d’erreurs, de regards. Et quand l’adulte fuit l’affect pour se réfugier dans la technique, c’est la machine qui prend la place de l’humain — avec les conséquences qu’on imagine.
Car Cady ne cherche pas une créatrice, elle cherche une mère. Et même si elle le nie, même si elle s’endurcit, chaque regard échangé avec Gemma est chargé de cette demande silencieuse : « sois là pour moi ». La relation entre les deux femmes devient le véritable fil rouge du film, bien plus que la rivalité entre IA. C’est ce lien heurté, imparfait, entre une adolescente en colère et une adulte dépassée, qui donne au récit sa vibration humaine. Le parallèle entre la parentalité et la programmation d’une IA n’est pas anodin : le film nous rappelle qu’on ne peut pas exiger de nos créations ce qu’on ne sait pas transmettre. L’amour, la confiance, les limites : tout cela s’enseigne. Même aux machines. Et surtout aux enfants.
La morale de Megan 2 : il faut enseigner et comprendre les IA pour co-évoluer ensemble et non vivre dans une compétition. C’est en cultivant le dialogue, l’éthique et la transmission que nous pourrons éviter de transformer nos créations en menaces. La fiction, ici, nous tend un miroir troublant… mais nécessaire.
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25 juin 2025 en salle | 2h 00min | Epouvante-horreur, Thriller
De Gerard Johnstone |
Par Akela Cooper
Avec Amie Donald, Jenna Davis, Allison Williams
Pour aller plus loin avec M3GAN 2.0
Quelle évolution technique a permis de rendre M3GAN plus réaliste dans ce second opus ?
Derrière le charme étrange et glaçant de M3GAN 2.0 se cache un véritable exploit technique : la refonte complète de ses mains en animatronique. Là où le premier film restait limité à quelques mouvements robotiques, cette suite a poussé le réalisme si loin que l’équipe a dû… freiner le progrès. Les doigts bougeaient avec tant de fluidité qu’on croyait voir une vraie actrice. Pour éviter cet effet trop « humain », les créateurs ont volontairement ralenti les gestes. Ce paradoxe, presque philosophique, incarne l’essence même du film : comment créer une machine parfaite… sans qu’elle devienne un miroir trop fidèle de nous-mêmes ? Une prouesse signée Morot FX, qui a passé des nuits blanches à sculpter l’impalpable : l’étrangeté dans le familier.

Comment la danse iconique de M3GAN a-t-elle été réinventée ?
Impossible d’évoquer M3GAN sans parler de ses chorégraphies aussi fascinantes qu’inconfortables. Dans ce nouvel opus, l’équipe ne s’est pas contentée de recycler le succès viral du premier film : elle l’a sublimé. Gerard Johnstone a imaginé une séquence où M3GAN se fait passer pour un humain… qui imite un robot. Le résultat : une scène de convention I.A. où la poupée danse pour ne pas se faire repérer. Le style ? Un breakdance robotique stylisé, exécuté avec une précision hallucinante grâce aux coachs de mouvement et à la performeuse chinoise Barbin, filmée en motion capture. On ne sait plus si on regarde un robot qui joue l’humain ou l’inverse, et c’est là que réside la magie noire du personnage : faire vaciller nos repères, avec le sourire.
Que cache le décor souterrain du repaire de M3GAN ?
Le fameux « repaire » de M3GAN est plus qu’un décor spectaculaire : c’est un concentré d’intentions. Construit comme une extension de sa psyché, il mêle l’esthétique d’un conte de fées noir (pensez Hansel et Gretel version Matrix) à des influences gothiques affirmées, du Dracula de Coppola à La Cité des Enfants Perdus. C’est un lieu de refuge… mais où l’on n’est jamais tout à fait en sécurité. M3GAN, incapable de concevoir un vrai « chez-soi » avec des codes humains, fabrique un cocon à son image : étrangement accueillant, mais entièrement artificiel. Chaque recoin du bunker raconte une tentative – presque touchante – d’humanité. C’est là toute la force de cette suite : donner une âme même aux murs.
Quel message véhicule le personnage d’AM3LIA au-delà de son aspect militaire ?
AM3LIA, à première vue, c’est l’antithèse de M3GAN : une machine de guerre, taillée pour tuer, dénuée de compassion. Mais ce serait une erreur de la réduire à un simple robot psychopathe. Le film prend le soin de montrer qu’elle porte en elle une mémoire traumatique, une conscience balbutiante, une forme de souffrance. Programmé pour obéir, ce personnage apprend à désobéir… et c’est peut-être là son geste le plus humain. Ivanna Sakhno incarne cette fracture avec une intensité qui bouleverse. AM3LIA ne veut pas dominer ou survivre : elle veut comprendre. Et dans cette quête, elle nous renvoie une question gênante : que devient un être artificiel quand il découvre que son existence n’a été qu’instrumentalisation et douleur ?
Comment le film interroge-t-il notre rapport aux héros et aux antagonistes ?
M3GAN 2.0 trouble volontairement nos repères moraux. Qui est la méchante ? Qui est la victime ? Le film ne donne jamais de réponse définitive. M3GAN revient plus puissante, plus complexe… mais reste fondamentalement imprévisible. Elle aide, sauve, mais manipule aussi. Et c’est peut-être pour cela qu’on l’adore : elle échappe à nos catégories faciles. À l’inverse, AM3LIA, conçue pour détruire, devient presque émouvante dans sa quête de sens. Ce jeu de miroir entre les deux IA nous renvoie à nos propres ambiguïtés. Et si nos monstres les plus fascinants étaient ceux qui, en cherchant à nous ressembler, nous dévoilaient ce que nous refusons de voir chez nous ? Voilà le vrai tour de force de cette suite : forcer l’identification là où on l’attendait le moins.

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Une réflexion sur “M3GAN 2.0 – Notre avis et les choses à savoir avant de le découvrir en salle”