Vermiglio ou La Mariée des Montagnes, réalisé par Maura Delpero, est un drame historique qui plonge le spectateur dans l’hiver 1944, au cœur d’un village isolé des montagnes du Trentin, en Italie. Lauréat du Grand Prix du Jury à la Mostra de Venise 2024, ce film narre l’histoire de Pietro, un jeune soldat déserteur sicilien, dont l’arrivée bouleverse la vie d’une famille locale. À travers une romance naissante entre Pietro et Lucia, la fille aînée de l’instituteur, le film explore les tensions familiales et sociales dans un contexte où la guerre est à la fois omniprésente et distante. Avec une esthétique soignée et une narration contemplative, Maura Delpero offre une réflexion poignante sur les sacrifices et les espoirs d’une communauté rurale en temps de guerre.
Voici 5 raisons de voir Vermiglio ou La Mariée des Montagnes
Nous vous donnons 5 raisons très rapidement de prêter attention à ce film :
• L’atmosphère visuelle poétique créée par la photographie de Mikhail Krichman, qui rappelle celle de Nestor Almendros dans les films de Truffaut. Les paysages enneigés du Trentin ceux de François Leterrier dans Un roi sans divertissement .
• La lenteur contemplative du récit immerge le spectateur dans un univers richement détaillé, où chaque geste compte.
• Le film explore la condition féminine dans une société patriarcale fragilisée par la guerre, mettant en lumière la résilience des femmes.
• Une réflexion poignante sur la foi religieuse et les dilemmes personnels dans un village isolé.
• La réalisatrice Maura Delpero puise dans son héritage personnel pour offrir un regard intime sur l’histoire.
L’ambiance et la photographie très marquée
L’atmosphère de Vermiglio ou La Mariée des Montagnes est empreinte de douceur et de mélancolie, capturant avec finesse le rythme lent de la vie paysanne. La photographie signée Mikhail Krichman évoque une esthétique nostalgique, rappelant les palettes colorimétriques des films de François Truffaut. Les paysages enneigés du Trentin, magnifiquement filmés, rappellent également l’adaptation du roman de Jean Giono, Un roi sans divertissement par François Leterrier (1963). Tout cela renforçant le sentiment d’isolement et de fragilité dans ce village montagnard. Les choix visuels – plans fixes méticuleux et lumière tamisée – subliment l’intimité des scènes tout en rendant hommage à une époque révolue. Cette approche contemplative peut déstabiliser certains spectateurs par sa lenteur, mais elle sert parfaitement à immerger dans un univers où chaque détail raconte une histoire.

Une vie tournée vers Dieu
Dans ce microcosme rural marqué par la guerre, la foi religieuse est omniprésente. Les habitants, décimés par les conflits, mènent une existence tournée vers Dieu, trouvant un sens à leurs sacrifices dans leur dévotion chrétienne ; l’une protagoniste note quotidiennement ses sacrifices dans un carnet et se remet sans cesse à la parole du prêtre, oubliant ses propres aspirations personnelles. Le film met en lumière le rôle central des figures notables du village – le maire, le prêtre et l’instituteur – qui incarnent l’autorité morale et sociale. Pietro lui-même s’intègre progressivement à cette communauté en participant aux messes et aux traditions locales. Cependant, cette foi collective contraste avec les dilemmes individuels : Lucia, enceinte et abandonnée après le départ de Pietro pour la Sicile, se retrouve confrontée aux jugements d’une société patriarcale où chaque acte personnel est scruté sous le prisme des valeurs religieuses.
Un film sur des femmes face à un monde d’hommes sur le déclin
Vermiglio ou La Mariée des Montagnes se distingue par son regard subtil sur la condition féminine dans un univers dominé par les hommes, mais fragilisé par la guerre. Si Lucia est au cœur de l’intrigue avec son amour pour Pietro, le film explore également les luttes silencieuses des autres femmes du village. Mères, sœurs ou veuves, elles portent le poids des absents et des décisions prises par les figures masculines – maire, prêtre, instituteur – tout en jouant un rôle crucial dans la survie de la communauté. La guerre agit comme un révélateur : elle ébranle l’ordre patriarcal et met en lumière la résilience féminine face aux jugements et aux sacrifices imposés. Maura Delpero capte avec finesse ces tensions, offrant une réflexion sur l’émancipation dans un monde en mutation.
Le film offre un regard nuancé sur la condition féminine dans un monde patriarcal ébranlé par la guerre. La réalisatrice met en lumière l’évolution des rôles féminins dans une société rurale italienne des années 1940, où les femmes, bien que souvent reléguées au second plan, commencent à remettre en question les discriminations et les idéologies sexistes.

Un film sur la transition de l’enfance à l’age adulte
L’héroïne Lucia incarne cette transition, passant du statut de jeune fille soumise à celui de femme déterminée face à l’adversité. Sa grossesse et l’absence de son mari révèlent les jugements d’une société patriarcale, mais aussi sa résilience. Le film explore également les luttes silencieuses d’autres femmes du village, mères et veuves, qui portent le poids des absents tout en jouant un rôle crucial dans la survie de la communauté.
Cette œuvre s’inscrit dans un contexte historique où les femmes italiennes ont activement participé à la Résistance, préfigurant leur émancipation future et l’obtention du droit de vote. Delpero capture avec finesse ces tensions, offrant une réflexion sur l’émancipation féminine dans un monde en mutation, où les rôles traditionnels masculins sont remis en question par les bouleversements de la guerre.
Genèse du film
Maura Delpero puise dans ses racines personnelles pour raconter cette histoire. Originaire du Trentin-Haut-Adige, elle s’est inspirée des récits de son père sur la vie dans ce village montagnard pendant la Seconde Guerre mondiale. Après avoir exploré la maternité dans son premier long-métrage Maternal, Delpero revient ici avec un regard intime sur une époque marquée par la survie collective et les sacrifices individuels. Le soin apporté à la reconstitution historique – des dialogues en patois local au grain photographique évoquant des tableaux flamands – témoigne d’une rigueur extrême. Cette œuvre italo-franco-belge est bien plus qu’un drame historique : elle capture un moment charnière où les traditions rurales commencent à s’effacer face aux bouleversements du monde moderne.
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19 mars 2025 en salle | 1h 59min | Drame
De Maura Delpero |
Par Maura Delpero
Avec Giuseppe De Domenico, Martina Scrinzi, Tommaso Ragno
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Une réflexion sur “Vermiglio ou La Mariée des Montagnes – regard sur la société des femmes en temps de guerre”