Manhattan-Kaboul, chanson poignante d’Axelle Red et Renaud, nous plonge dans les tragédies humaines liées à la guerre, le tout avec des images frappantes qui confrontent l’injustice, l’exil et la violence. L’artiste nous invite à réfléchir sur des réalités géographiques et humaines, opposant le rêve américain et la guerre afghane.
«Manhattan-Kaboul» naît d’une vieille musique de Jean-Pierre Bucolo, que Renaud garde longtemps sans texte, jusqu’aux attentats du 11-Septembre et à la guerre en Afghanistan qui déclenchent l’écriture, quasiment d’un trait, sur la console du studio bruxellois où il enregistre «Boucan d’enfer». Il pense immédiatement cette chanson chorale en duo, voix d’un trader portoricain de Manhattan contre voix de fillette afghane de Kaboul, et cherche un timbre féminin fort pour incarner ce contrechamp. Axelle Red s’impose alors : ils sont dans la même maison de disques, Renaud aime déjà sa sensibilité soul et la qualifie de sa chanteuse francophone préférée, au point de dire qu’il a écrit le texte en pensant à elle, ce qui scelle un duo appelé à devenir un classique.
Avec Manhattan-Kaboul, Axelle Red et Renaud tissent une métaphore poignante entre les destins croisés de deux individus, l’un portoricain à New York et l’autre afghane, luttant contre une violence impitoyable. À travers ce morceau, les artistes invitent à une réflexion profonde sur les contrastes du monde contemporain. En l’espace de quelques paroles, ils parviennent à dépeindre la violence du monde moderne tout en posant un regard sur la fragilité des rêves humains. Leur façon de tordre les attentes, en jouant avec les identités et les violences sociétales, révèle une approche sincère et originale du traitement des émotions humaines.
Axelle Red, réputée pour sa voix distinctive et sa capacité à aborder des sujets poignants avec une grande sensibilité, a su se faire entendre sur la scène musicale francophone dès ses débuts. L’artiste a construit sa carrière autour de chansons qui expriment une profonde empathie envers les luttes sociales et humaines. Ses paroles ne sont jamais superficielles, elles touchent des réalités brutes, souvent enfouies sous des couches de silence. Renaud, quant à lui, est un maître dans l’art de la dénonciation sociale et politique. Son engagement se reflète dans des textes qui abordent les grandes problématiques sociétales, tout en mettant en lumière les souffrances invisibles des individus. Dans Manhattan-Kaboul, les deux artistes explorent les conséquences humaines de la guerre et des injustices, entre le rêve américain et la guerre en Afghanistan, tout en offrant un regard acéré sur la politique mondiale. L’influence des réalités géopolitiques actuelles est indéniable dans ce morceau, où l’on retrouve une critique acerbe des idéaux et des conflits, tout en mettant en scène des personnages issus de mondes apparemment opposés mais néanmoins unis par la violence de leur existence.
La chanson Manhattan-Kaboul met en lumière l’abîme de séparation qui existe entre deux mondes, celui d’un Portoricain bien intégré à New York, et celui d’une petite fille afghane en pleine guerre. Ces personnages, malgré leurs origines et parcours opposés, se retrouvent unis par un événement tragique, l’attaque des tours du World Trade Center en 2001. L’utilisation des images puissantes comme « un 747 s’est explosé dans mes fenêtres » ou « les bombes ont rasé mon village » sert non seulement à figurer la violence des événements, mais aussi à rendre palpable la dévastation émotionnelle des individus affectés. La chanson, au travers de ces métaphores, invite l’auditeur à comprendre que ces deux vies, aussi différentes soient-elles, se brisent de manière irréversible sous l’impact de la violence mondiale. Les paroles sont un appel à prendre du recul face à des événements qui semblent lointains, mais qui, en réalité, affectent tout le monde, peu importe la géographie.
Ce qui fait la singularité de Manhattan-Kaboul, c’est la manière dont la chanson pousse la réflexion au-delà des simples conséquences des événements violents. Plutôt que de se contenter d’un constat de désolation, elle propose une introspection sur la condition humaine et les idéaux qui gouvernent nos sociétés. La question de l’Islam des tyrans ou du rêve américain désillusionné (« je serai pas maître de l’univers ») nous invite à repenser les principes sur lesquels nous avons fondé nos sociétés et leurs valeurs. L’image du « colosse aux pieds d’argile » résume cette idée de la fragilité des civilisations et de l’illusion des pouvoirs dominants. À travers cette réflexion, la chanson pousse l’auditeur à une prise de conscience implacable : la guerre, la religion, et les idéologies ne font que diviser l’humanité en « chair à canon », un terme utilisé dans les paroles pour exprimer la banalisation de la souffrance humaine. Cette émotion d’impuissance et de questionnement est, en quelque sorte, une prise de recul irrémédiable face à l’absurdité des conflits modernes.
Mise en analogie de deux sacrifiés du destin
Manhattan-Kaboul, chanson poignante d’Axelle Red et Renaud, fait une analogie dévastatrice entre la guerre contre Al-Qaïda et la destruction des tours du World Trade Center. À travers les voix de deux personnages, l’un portoricain à New York et l’autre afghane, la chanson nous plonge dans une réalité partagée par ceux qui, malgré leurs différences culturelles et géographiques, se retrouvent écrasés par la même violence aveugle. Les deux âmes sacrifiées, l’une engloutie dans l’agitation urbaine et l’autre plongée dans la misère de la guerre, ne désirent qu’une seule chose : vivre. Leur existence, marquée par des rêves brisés, devient la métaphore de la dévastation des rêves américains et des espoirs brisés dans le monde entier. La chanson dénonce la folie des idéologies violentes, qui écrasent tout sur leur passage, sans jamais comprendre la simplicité du désir humain : celui de vivre en paix. À travers cette mise en parallèle, Manhattan-Kaboul invite à prendre du recul, à réfléchir sur la fragilité de la vie humaine face à la barbarie des guerres et des extrémismes.
Dans Manhattan-Kaboul, Axelle Red et Renaud dressent un dialogue puissant entre deux personnages que tout oppose : un américain d’adoption, d’abord vu comme un symbole de réussite et d’intégration, et une jeune afghane, prisonnière de sa culture en guerre. L’un des vers les plus saisissants de la chanson est celui où l’homme, vivant à New York, dénonce « l’Islam des tyrans ». Il critique une vision dévoyée de l’islam, une idéologie imposée par la violence, un islam manipulé pour justifier des oppressions politiques et des atrocités commises au nom de la religion. Mais la réponse de la jeune afghane, sur l’autre côté du monde, est poignante. Elle interroge ce discours imposé par l’oppression, se demandant si ceux qui la jugent et tentent de lui imposer leur vision ont seulement pris la peine de lire le Coran. C’est un appel à comprendre la véritable essence de la religion, un appel à ne pas confondre la foi et les actes violents de ceux qui prétendent la défendre.
Son intervention est un cri de résistance face à la simplification et à l’instrumentalisation de la religion pour justifier la guerre. Elle refuse de se voir réduite à une victime soumise à un conflit extérieur. Sa question « Ont-ils seulement lu le Coran ? » met en lumière l’incompréhension profonde entre l’Occident et l’Orient : une incompréhension qui va au-delà des religions, touchant à l’essence même de l’identité culturelle et spirituelle. Elle révèle la tension entre un Islam de paix, souvent mal compris, et la violence aveugle qui est imposée aux peuples au nom de cette même religion. En évoquant cette question, l’artiste souligne que la guerre et les dérives idéologiques ne sont pas le produit de la foi en elle-même, mais d’une interprétation erronée et manipulée, instrumentalisée pour des fins politiques.
Cette confrontation de points de vue, ce dialogue entre les deux personnages, transforme la chanson en une réflexion plus large sur la guerre, la religion, et l’ignorance. La jeune afghane, tout comme son interlocuteur, incarne une volonté de vivre, d’exister en dehors des conflits, en dehors des interprétations violentes et oppressantes de la religion. Le message qui se dégage de cette chanson n’est pas seulement un appel à la paix, mais une mise en garde contre la manipulation des idéologies.
Encore d’actualité, les internautes reviennent presque tous au même constat : Manhattan-Kaboul reste « toujours d’actualité », et c’est précisément ce qui la rend si douloureuse. Beaucoup disent avoir « la boule au ventre », être « pris aux tripes », et saluent l’alliance entre la voix sensible d’Axelle Red et l’écriture de Renaud, même quand certains notent que sa voix a pu dérailler avec le temps, car « quelles paroles ». On lit aussi une grande vague de nostalgie, ceux qui l’ont apprise à l’école, au collège, en primaire, et qui la rechante aujourd’hui, en passant le témoin. D’autres viennent juste écrire « qui est là en 2025 », comme on signe un rendez vous de mémoire. Enfin, quelques débats surgissent sur la religion, la phrase sur le Coran déclenche des réactions opposées, preuve que la chanson ne caresse pas, elle réveille.
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