L’âme idéale – Une comédie sentimentale simple et efficace !


Avec L’Âme idéale, Alice Vial signe une comédie romantique teintée de fantastique qui interroge notre rapport à la mort sans jamais sombrer dans le morbide. À travers une histoire d’amour impossible, le film explore la solitude, le deuil et le besoin vital de réapprendre à vivre, avec délicatesse et humanité.


Elsa a 40 ans. Célibataire, réservée, elle semble s’être mise à distance du monde et des relations amoureuses. Son quotidien est marqué par un don singulier qu’elle ne revendique jamais comme une force : elle voit et parle aux morts. Cette capacité, loin de la rendre spéciale aux yeux des autres, l’isole davantage. Elsa travaille aux soins palliatifs, un lieu où la frontière entre la vie et la mort est déjà fragile, et où son rapport à l’invisible prend une dimension presque fonctionnelle, intime, silencieuse.

Sa rencontre avec Oscar bouleverse cet équilibre précaire. Drôle, charmant, maladroit parfois, il incarne une forme de légèreté inattendue dans la vie d’Elsa. Leur relation s’installe naturellement, sans artifice, comme une respiration nouvelle. Pourtant, cette histoire porte en elle une étrangeté fondamentale : Oscar n’est pas exactement là où il croit être. Le film s’articule alors autour de trois questions récurrentes, presque rituelles : « Sais-tu que tu es mort ? », « Acceptes-tu de quitter les vivants ? », « Il y a une chose inachevée ? ».

À travers Elsa et Oscar, L’Âme idéale ne raconte pas un mensonge ou un jeu de dupes, mais la rencontre de deux solitudes compatibles, incapables d’aimer pleinement tant qu’elles n’acceptent pas ce qu’elles sont réellement.

L’Âme Idéale © Marie-Camille Orlando – 2025 Les Films entre 2 & 4 – Gaumont – TF1 Films Production

Rencontre de Jonathan Cohen et de l’une des stars montantes du Québec, Magalie Lépine-Blondeau, dans une RomCom à couper le souffle.

La rencontre entre Jonathan Cohen et Magalie Lépine-Blondeau constitue le cœur émotionnel de L’Âme idéale. D’un côté, Jonathan, que le public associe souvent à la comédie pure, aux personnages excessifs ou ironiques. De l’autre, Magalie, figure majeure du cinéma québécois contemporain, reconnue pour son jeu précis, intériorisé, capable de faire exister le silence autant que la parole. Leur association n’a rien d’évident, et c’est précisément ce décalage qui donne au film sa respiration singulière.

Jonathan Cohen incarne Oscar avec une retenue inhabituelle. Parce que son personnage n’interagit qu’avec Elsa, son jeu repose sur une forme de douceur permanente, presque à fleur de peau. Il interprète un homme qui doute, qui manque de confiance en lui, et qui ose l’avouer. Cette vulnérabilité assumée est rare dans la comédie romantique française, souvent attachée à des figures masculines sûres d’elles ou ironiquement détachées. Ici, Oscar existe dans une fragilité sincère, jamais ridiculisée.

Face à lui, Magalie Lépine-Blondeau compose une Elsa fermée, blessée, presque figée au début du film. Son travail repose sur une transformation progressive. Elle ne force jamais l’émotion. Son personnage s’ouvre lentement, à mesure que la relation avance, comme si aimer redevenait un geste à réapprendre. La comédienne apporte à Elsa une profondeur particulière, nourrie par son expérience et par un rapport très incarné au personnage, notamment à travers sa préparation auprès de soignants en soins palliatifs.

L’alchimie entre les deux acteurs ne tient pas à des dialogues brillants ou à des situations appuyées, mais à une complicité organique, presque évidente. Leur relation à l’écran donne le sentiment d’un espace protégé, hors du monde, où deux êtres abîmés peuvent enfin se dire sans masque. Cette RomCom ne cherche jamais l’effet, elle privilégie la justesse, la sincérité, et c’est précisément ce qui la rend aussi touchante.

L’Âme Idéale © Marie-Camille Orlando – 2025 Les Films entre 2 & 4 – Gaumont – TF1 Films Production

Comment parler de l’au-delà sans faire peur

L’Âme idéale s’inscrit dans une tradition de récits où le fantastique sert avant tout de révélateur émotionnel. Les inspirations revendiquées par Alice Vial puisent autant dans le cinéma classique que dans une approche contemporaine du genre. Des films comme Ghost, Rencontre avec Joe Black ou encore L’Aventure de Madame Muir nourrissent l’imaginaire du film, non pour leurs effets spectaculaires, mais pour leur capacité à faire exister la mort comme une présence sensible, quasiment familière.

La mise en scène adopte un réalisme poétique assumé. Les morts ne surgissent pas pour effrayer, ils sont là, envahissants parfois, capables d’interagir avec leur environnement, coincés entre deux mondes. Le film refuse le sensationnalisme. Il ne cherche ni le frisson ni le choc visuel. Au contraire, il s’attache à rendre concret ce qui est habituellement abstrait : le passage, l’attente, l’inachevé.

Ce choix permet d’aborder l’au-delà sans angoisse. La mort n’est jamais une menace, mais une étape, une question en suspens. Le film parle surtout des vivants, de ce qu’ils taisent, de ce qu’ils n’osent pas montrer en amour par peur de ne pas être aimés. L’au-delà devient alors un miroir, un espace symbolique où se rejouent nos propres blocages.

En évitant le kitsch et la peur, L’Âme idéale trouve un équilibre délicat entre légèreté et gravité. Le spectateur ressort avec un sentiment paradoxal de mélancolie apaisée, presque allégée. Le film ne donne pas de réponse définitive, mais invite à une chose essentielle : profiter de son vivant des choses de la vie, avant que les questions ne deviennent définitives.

Notre avis sur le film

Le format 1h30 pourrait même être un pilote d’une série pour Arte par exemple, un peu à la True Calling et Dead Zone. Le film a cependant une faille, le rythme se fracasse quand Oscar comprend les choses, et l’on bascule alors dans une RomCom plus traditionnelle. Malgré cela, le film rappelle l’importance de profiter de son vivant des choses de la vie, et l’ensemble, malgré quelques faiblesses, reste sublime. L’idée est bonne, on aime beaucoup les deux acteurs principaux, et découvrir Jonathan dans un drame permet de voir un registre différent, plus nuancé et moins attendu.

Il y a 3 questions, qui sont toujours les mêmes : « Sais-tu que tu es mort ? », « Acceptes-tu de quitter les vivants ? », « Il y a une chose inachevée ? ». Voir les morts est envahissant, d’autant plus qu’ils sont capables d’interagir avec leur environnement, comme pris entre deux mondes. Le film arrive à proposer quelque chose de concret, et les mécanismes du passage vers la lumière restent un classique du genre, assumé et efficacement mis en place.

Finalement, L’Âme idéale laisse une impression douce et persistante. On passe un bon moment de cinéma, on rit et on pleure sans jamais avoir le sentiment d’être manipulé par l’émotion. Le film trouve sa force dans cette simplicité assumée, dans sa capacité à parler de la mort, de la solitude et de l’amour sans lourdeur ni cynisme. Il rappelle que les rencontres importantes arrivent parfois quand on a cessé d’y croire, et que vivre pleinement passe aussi par l’acceptation de nos fragilités. L’ensemble touche juste grâce à une mise en scène pudique et à des interprétations sincères. Un film qui ne cherche pas à impressionner, mais à réconforter, et qui laisse le spectateur un peu plus léger en sortant de la salle.

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Note : 5 sur 5.

17 décembre 2025 en salle | 1h 38min | Comédie, Fantastique, Romance
De Alice Vial | 
Par Alice Vial, Jean-Toussaint Bernard
Avec Jonathan Cohen, Magalie Lépine Blondeau, Florence Janas


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