Girls for Tomorrow retrace dix années d’engagement, de doutes et de conquêtes intimes. Nora Philippe suit quatre jeunes femmes qui se construisent dans un monde façonné par les hommes, entre éveil politique, sororité et révélations personnelles.

Porté par une décennie de rencontres et de confidences, Girls for Tomorrow suit quatre jeunes femmes qui ont traversé les années 2015 à 2024 en transformant leurs combats en trajectoires d’émancipation. Arrivée à New York avec un bébé dans les bras, Nora Philippe découvre Barnard College, l’un des foyers intellectuels du féminisme contemporain, et croise la route d’Evy, Lila, Anta et Talia. De la Women’s March à Black Lives Matter, de #MeToo aux mobilisations pour le climat, ces amitiés deviennent un fil rouge pour comprendre comment une génération politisée, multilingue et plurielle se construit dans un monde en mutation. À travers leurs choix, leurs doutes et leurs fidélités, le film interroge ce que signifie grandir en tenant tête à l’injustice.

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Girls for Tomorrow raconte dix années pendant lesquelles quatre étudiantes croisent l’histoire contemporaine tout en cherchant leur propre voie. Le film s’ouvre sur Lila, jeune femme du Montana marquée par l’accident qui a bouleversé sa famille et engagée très tôt dans la justice environnementale. Vient Evy, élevée hors des États-Unis, dont l’humour, la liberté de ton et la lucidité féministe donnent au récit une énergie singulière. Talia, issue d’un milieu juif orthodoxe, avance en questionnant son héritage et devient journaliste, guidée par le désir d’émancipation. Anta, brillante lectrice et boursière, porte un passé sans archives et une détermination qui structure l’ensemble. En les retrouvant année après année, le film observe leurs choix, leurs résistances et leur manière d’articuler intime et politique dans un pays traversé par des bouleversements majeurs.

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Déconstruction d’un monde d’Homme pour les hommes

Dans Girls for Tomorrow, Nora Philippe s’attache à montrer ce que signifie devenir femme dans un monde conçu, organisé et perpétué par des hommes. Le film prend acte de cette architecture sociale profondément ancrée, où les codes, les attentes, les institutions et même les imaginaires ont été bâtis pour servir un pouvoir masculin. Au cœur de ce paysage, quatre jeunes femmes font leur entrée dans l’âge adulte. Elles avancent avec la sensation d’être à la fois héritières d’un système qui n’a jamais été pensé pour elles et porteuses d’un désir brûlant de le transformer.

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Elles découvrent ce monde depuis un lieu à part, presque sacré : une université dédiée aux femmes, Barnard College, espace d’étude, de réflexion et de sororité où l’on questionne autant l’histoire que l’avenir. Dans cet environnement, les champs des possibles s’ouvrent comme jamais. Entre émerveillement, défiance, doutes légitimes et élans de confiance, elles expérimentent ce que cela signifie de penser, de militer, de se chercher et de s’affirmer sans que l’ombre masculine ne domine immédiatement l’horizon. Le film montre cette bascule subtile, ce moment où l’on découvre que l’on peut vivre autrement, où l’on ose déconstruire un monde qui semblait immuable pour tenter d’en bâtir un nouveau.

Quand le couple se sépare

Ce voyage collectif s’entremêle intimement avec celui de Nora Philippe elle-même. Alors qu’elle filme ces trajectoires de jeunesse, elle traverse de son côté une séparation douloureuse, une remise en cause profonde de sa place dans son couple et, plus largement, dans sa propre famille. Ce qui commence comme un documentaire sur la construction politique d’une génération glisse progressivement vers une exploration personnelle de la désillusion. La réalisatrice observe la manière dont elle a été réduite, reléguée, parfois même ignorée, au sein d’un foyer où, malgré les apparences, les rapports de forces restaient marqués par une tradition patriarcale tenace.

Ces deux récits avancent en miroir. Les jeunes femmes interrogent la société, ses structures, ses injustices, ses modèles figés. Elles apprennent à prendre la parole, à militer, à transformer leur vulnérabilité en force. La réalisatrice, de son côté, interroge sa propre histoire, son rôle de mère, son rapport à l’intime, son besoin d’exister autrement que dans le regard de l’autre. Le film crée ainsi un espace où émerge une vérité plus vaste : comprendre ce que signifie devenir femme ne peut se faire qu’en affrontant à la fois le monde extérieur et les blessures silencieuses de l’intérieur.

Dans cette tension entre luttes collectives et combat intime, Girls for Tomorrow dévoile une génération qui avance malgré les failles, les incertitudes et les fragilités, mais avec une détermination farouche à réinventer ce qui leur a été transmis. Une génération qui refuse d’accepter les cadres du passé comme des fatalités et qui, en découvrant ses propres forces, redessine peu à peu l’avenir.

Girls for Tomorrow trouve sa force dans cette articulation rare entre chronique politique et quête intérieure. En observant quatre jeunes femmes apprendre à se frayer un chemin dans un monde façonné pour d’autres, le film révèle la puissance des voix qui se cherchent, s’élèvent et finissent par s’affirmer. Leur lucidité, leurs fragilités et leur énergie collective composent un miroir qui renvoie à chacun le désir d’un futur plus juste. Le geste de Nora Philippe apporte une dimension supplémentaire, intime et profondément humaine. À travers sa séparation, ses doutes de mère et son besoin de redéfinir sa place, elle inscrit ce récit dans quelque chose de plus vaste : une réflexion sur ce que signifie se reconstruire quand les repères s’effondrent. En croisant ces trajectoires, le film devient une transmission, une manière de dire que l’émancipation n’est jamais un chemin solitaire, mais la somme de liens, de résistances et de réinventions. Girls for Tomorrow rappelle que les luttes d’aujourd’hui forgent les possibles de demain, et que grandir consiste parfois à relever la tête là où tant auraient baissé les yeux.

Pour aller plus loin

Comment le film utilise-t-il le temps long pour raconter l’évolution des protagonistes ?

Le film s’appuie sur dix années de tournage, ce qui permet de saisir des transformations impossibles à percevoir sur une courte période. Les choix, les ruptures, les hésitations et les prises de conscience apparaissent dans toute leur complexité, car le temps révèle ce que chaque femme conserve, abandonne ou réinvente. Cette durée crée un lien profond entre la caméra et les protagonistes, offrant un regard nuancé sur leur évolution.

Pourquoi Barnard College joue-t-il un rôle si central dans le récit ?

Barnard College n’est pas seulement un décor, c’est un espace symbolique où les jeunes femmes découvrent une pensée libre, exigeante et ancrée dans la sororité. Étudier dans une université dédiée aux femmes transforme leur rapport au savoir et à la parole. Elles y apprennent à s’exprimer sans crainte d’être minorées ou interrompues, ce qui influence profondément leur manière de voir le monde et de s’y engager.

Quelle place le film accorde-t-il à la question de l’héritage et de la transmission ?

Le film interroge constamment la manière dont on hérite d’un monde, d’une histoire, d’un système de valeurs parfois oppressant. Chaque jeune femme doit composer avec ses origines, ses blessures et ses modèles pour tracer une voie plus juste. En parallèle, Nora Philippe transmet à sa fille une autre manière de grandir, plus consciente et plus libre. Cette double transmission donne au film une portée universelle et intergénérationnelle.

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10 décembre 2025 en salle | 1h 38min | Documentaire
De Nora Philippe | 
Par Nora Philippe