Entre Mille, Éléonore Sayle signe un premier EP apaisant et profondément mature


Éléonore Sayle revient avec un premier EP Entre Mille où s’entrelacent douceur, lucidité et quête intérieure. Entre Mille explore le vertige du temps, Le début du reste questionne nos élans, et Tout comme il faut embrasse les failles avec une nostalgie assumée. Une artiste qui cherche, ressent et avance avec sincérité.

On a quelques mois déjà présenté cette jeune artiste. Éléonore Sayle, originaire de Nice, elle se forge entre musique classique, variété et héritage familial. Après ses débuts scéniques dans le Sud puis son installation à Paris, elle perfectionne son art aux Cours Florent et à l’Académie Oscar Sisto. Guidée par ROSE et accompagnée par Régis Ceccarelli, elle signe un premier EP élégant et sensible, où l’émotion et l’interprétation sont au cœur de son identité artistique.

L’EP s’ouvre avec Entre Mille, il y a dans ces mots un vertige discret, une sensation étrange de glisser hors de soi à mesure que le temps avance. Le sens des paroles respire cette impression de se regarder vivre sans vraiment se rejoindre, comme si chaque saison déposait une couche d’écart supplémentaire. On y sent l’usure douce, la mélancolie de celles et ceux qui cherchent leur propre trace alors que tout continue de bouger sans eux.

Éléonore explique en interview vouloir mettre en avant une voix sincère et habitée, une écriture élégante où chaque mot pèse et invite à l’introspection. Ce glissement intérieur que décrit la chanson trouve un écho direct dans cette démarche artistique, car l’artiste façonne une pop sensible qui explore les zones mouvantes de l’identité, du manque et du temps. Là où les paroles exposent une perte de repères, les explications de l’artiste soulignent une esthétique qui cherche à les éclairer avec justesse et émotion. On retrouve un peu de William Sheller dans le piano de ce début d’opus, — peut-être cette forme de mélancolie contemplative sur ce bonheur qui s’écrit avec ou sans nous —. Prise de conscience essentielle comme pour rappeler que nous devons être les acteurs de notre propre vie, sans quoi nous en serons que les témoins passifs.


Dans Le début du reste, Éléonore adopte une façon de parler de la vie très ancrée dans le réel, presque terre à terre, même quand elle utilise des images poétiques. Elle pose des questions simples, presque naïves, mais qui touchent à ce que chacun traverse : les envies qui changent, les nuits qui se dispersent, les doutes qui renaissent. Sa manière de questionner l’avenir n’a rien de grandiloquent, elle n’attend pas de réponses héroïques. Au contraire, elle évoque cette idée que la vie avance comme elle peut, sans mode d’emploi, et que l’on fait avec ce qu’on a. Il y a une acceptation discrète dans le fait de demander « ce sera quoi après la pluie », comme si l’on savait déjà que la pluie fait partie du décor et qu’on ne peut pas la supprimer. Ce réalisme n’est pas fataliste, il est lucide.

La chanson rejoint l’esprit de Fabien Cahen dans son single Et Nous, dans cette manière de replacer l’amour, les choix et les regrets à un niveau humain, quotidien, loin des illusions romantiques. Éléonore parle de l’existence comme d’un processus où l’on trébuche, où l’on fait semblant parfois, où l’on tente de transmettre à ses enfants quelque chose de vrai, sans maquillage. Quand elle imagine ce que l’on dira aux mômes, elle décrit une philosophie simple, presque consensuelle, mais profondément honnête : donner les moyens, sauter dans des trains, ne pas traîner dans les gares, avancer même quand on doute. C’est une vision de la vie où l’on prend les choses comme elles viennent, où l’on reconnaît avoir perdu du temps, mais où l’on continue malgré tout.

Et c’est là que le refrain prend tout son sens : « C’est que le début du reste ». Cette phrase, répétée comme un mantra, dit qu’il n’est jamais trop tard. C’est une manière douce et lucide de regarder la vie : rien n’est parfait, on n’a jamais vraiment grandi, on se débat avec ses failles, mais on avance ensemble, avec des ailes fragiles, des comètes imaginaires et des fenêtres comme horizon. Éléonore propose une vision sans illusion excessive, mais pleine de souffle, où le réalisme n’empêche ni l’amour ni la fête, et où l’on accepte que le reste commence toujours maintenant.

©YANN_ORHAN

Dans Tout comme il faut, Éléonore poursuit ce fil nostalgique qui traverse tout l’EP, celui d’une acceptation douce, parfois résignée, mais toujours lucide. Elle évoque cette tentation de se plier aux attentes, de corriger ses défauts pour entrer dans le moule, tout en reconnaissant qu’on reste fébrile, traversé de doutes. Le refrain répète qu’on oubliera demain, comme une manière de lâcher prise sur ce qui échappe. La chanson parle d’illusions qu’on crée pour survivre, de ces petits riens qui nous tiennent debout malgré les tourments. Il y a dans cette chanson un va et vient entre ce que l’on voudrait être et ce que l’on est réellement, un équilibre fragile où la nostalgie devient un refuge. Elle dit que la vie avance avec ses travers, qu’on s’y perd ou qu’on s’y gagne, mais qu’au fond, il faut continuer à regarder briller les jours sans trop s’y accrocher. On aime l’idée du savant fou qui se moquerait de tout, un peu comme toutes ces chansons où l’on accepte de devenir tout et n’importe quoi pour prolonger un peu l’ivresse et le rêve.

Ce premier EP impose Éléonore Sayle comme une voix qui ne triche pas, capable d’embrasser le doute, la tendresse et le réel avec une justesse rare. Ses chansons, sensibles et habitées, évoquent la vie telle qu’elle est, avec ses vertiges et ses éclaircies. Un projet élégant, intime, et déjà profondément personnel.

On aime ce genre de pop qui nous ramène à une époque, celle du début des années 2000, ce moment de la nouvelle scène française avec Dolly, Luke, Autour de Lucie. On avait des textes, des mélodies et des productions qui nous accompagnaient et semblaient hors du temps. Écoutez Numb de Linkin Park, Wherever You Will Go de The Calling ou encore Vanessa Carlton… ça ne vieillit pas. Et on souhaite le meilleur pour cette artiste.


En savoir plus sur Direct-Actu.fr le blogzine de la culture pop et alternative

Abonnez-vous pour recevoir les derniers articles par e-mail.

Un commentaire ça aide toujours !

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.