Héritier du mythe de Zorro et du roman de cape et d’épée, Le Masque de Zorro revisite la figure du justicier à travers une transmission de pouvoir, entre vengeance intime, fresque romanesque et spectacle populaire moderne.
Le Masque de Zorro (1998) s’inspire d’abord du personnage créé en 1919 par Johnston McCulley, lui‑même nourri de figures historiques ou semi‑légendaires comme le bandit Joaquin Murrieta et le conspirateur Guillén de Lampart, justiciers ou criminels devenus mythes populaires en Californie et au Mexique. Le film de Martin Campbell reprend aussi tout un héritage de cinéma de cape et d’épée (Douglas Fairbanks, Tyrone Power) et le filtre à travers les codes modernes du blockbuster romantique, de l’origin story super‑héroïque et du récit de vengeance à la Monte‑Cristo.

Le film en quelques mots
Situé en Californie dans les années 1840, le film suit Don Diego de la Vega, Zorro vieillissant, qui s’évade après vingt ans de prison pour affronter à nouveau le gouverneur Rafael Montero, responsable de la mort de sa femme et de l’enlèvement de sa fille Elena. Conscient que son temps est passé, il choisit comme héritier un brigand mexicain, Alejandro Murrieta, qu’il forme à devenir un noble raffiné le jour et un justicier masqué la nuit, afin de déjouer le projet de Montero de s’approprier la Californie grâce à une mine d’or exploitée par des paysans réduits en quasi‑esclavage. Entre grandes scènes de cape et d’épée, romance enflammée et humour de comédie d’aventures, le film joue sur la thématique du passage de flambeau et de la tension entre vengeance personnelle et lutte pour le bien commun.
Le casting en or
- Antonio Banderas incarne Alejandro/Zorro, mélange de gouaille de brigand, de sensualité romantique et de grâce acrobatique, qui redéfinit le héros en le rendant issu du peuple qu’il défend. Sa prestation physiquement engagée, dans les duels comme dans les scènes comiques, donne au personnage une dimension à la fois iconique et profondément humaine.
- Anthony Hopkins prête sa gravité à Don Diego de la Vega, Zorro originel brisé par l’emprisonnement, qui devient mentor ironique et mélancolique, figure de père de substitution et conscience morale du récit. Son jeu, tout en retenue, donne au film un poids tragique qui ancre la fantaisie dans une vraie douleur.
- Catherine Zeta‑Jones, révélée internationalement par le rôle d’Elena, apporte un mélange de noblesse, de tempérament et de sensualité, faisant de son personnage bien plus qu’un simple intérêt amoureux. L’alchimie très physique et verbale entre elle et Banderas, notamment dans la scène de duel‑striptease au fouet, participe largement au charme durable du film.
- Autour d’eux, Stuart Wilson (Montero) et Matt Letscher (le sadique capitaine Love) composent des méchants d’un cynisme tranquille, parfaits pour porter la dimension de vengeance et de lutte de classes, tandis que le casting de seconds rôles hispanophones renforce la couleur locale et le rapport au contexte historique.
La parenté avec Le Comte de Monte‑Cristo
La proximité avec Le Comte de Monte‑Cristo tient d’abord à l’architecture même du récit : un héros dépossédé (Diego privé de sa femme et de sa fille, enfermé pendant vingt ans) qui revient dans un monde transformé pour se venger de ceux qui l’ont trahi. Comme Edmond Dantès, il réapparaît sous une nouvelle identité et orchestre sa vengeance à distance, manipule les puissants, infiltre les salons de l’ennemi et se sert de son statut social reconstruit comme d’une arme.
Le film pousse encore plus loin cette similitude par le dispositif maître‑élève : Diego devient une sorte de Monte‑Cristo qui façonnerait son propre instrument de vengeance en la personne d’Alejandro, le transformant de voleur analphabète en « gentilhomme » parfaitement à l’aise dans les bals aristocratiques. Cette construction rappelle la façon dont Dantès manipule et forme certains personnages pour qu’ils agissent, parfois sans le savoir, comme relais de sa vengeance.
Enfin, les deux œuvres articulent vengeance individuelle et justice sociale : chez Dumas, la punition des traîtres se double d’une réflexion sur l’injustice de classe et la corruption des élites, et Le Masque de Zorro transpose ce schéma en Californie, en liant la vendetta de Diego et Alejandro à la libération de paysans exploités dans la mine de Montero. Comme dans Le Comte de Monte‑Cristo, la question centrale devient : jusqu’où peut‑on aller au nom de la vengeance avant de perdre son âme, et à quel moment le bien commun doit‑il l’emporter sur la satisfaction personnelle du règlement de comptes.
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