Avec Rebuilding, Max Walker-Silverman signe un drame profondément humain sur l’après-catastrophe. Loin du film spectaculaire, le cinéaste observe comment un homme, privé de tout par les incendies, réapprend à habiter le monde, les autres, et lui-même, dans un Ouest américain blessé mais vivant.
Dans Rebuilding, l’histoire s’ancre dans un territoire ravagé par les incendies de forêt. Dusty, rancher solitaire, voit son ranch partir en fumée. Contraint de quitter la terre qui structurait son identité, il trouve refuge dans un camp de mobile homes FEMA, espace précaire où se croisent des vies suspendues. Autour de lui gravite une communauté improvisée, faite de voisins meurtris mais solidaires, qui redonne peu à peu chair à l’idée de foyer.
Dusty est un homme taiseux, façonné par le mythe de l’autonomie américaine, mais fragilisé par la perte. Son parcours ne consiste pas à reconstruire des murs, mais à accepter l’aide, le lien, et la dépendance affective. Son espoir secret reste Callie-Rose, sa fille, dont la présence agit comme un rappel constant de ce qu’il pourrait redevenir. Ruby, son ex-femme, incarne une stabilité émotionnelle inaccessible néanmoins toujours désirée. Autour d’eux, Mila et Bess, figures de soin et de transmission, donnent au film sa chaleur collective.
Max Walker-Silverman filme ces personnages avec pudeur, laissant les silences, les gestes simples et la beauté des paysages exprimer ce que les mots taisent. Rebuilding devient alors un récit de résilience intime, où la reconstruction passe par l’amour, la communauté, et l’acceptation de l’impermanence.

Filmer la beauté de l’éphémère et la contemplation
Le film est beau et poétique. C’est peut-être le mot qui vient à l’esprit quand on regarde ce drame. De la contemplation, de l’amour également, le récit d’un combat pour se reconstruire, pour retrouver un équilibre. Le rapport père-fille est intense et la complicité transparaît dans ces petits riens du quotidien.
Lily LaTorre, Josh O’Connor et Meghann Fahy forment une famille étrange, mais où chacun pose des questions non pas pour la forme, mais pour essayer d’apporter un peu de compassion dans un quotidien presque ravagé par des incendies.
Tous ces sinistrés vivent avec la question de QUAND et COMBIEN de temps je suis tranquille ? Difficile de poser ses bagages, de prendre racines quand nous sommes dans l’incertitude d’un prochain ouragan dans notre vie ! Cette inquiétude sourde ne quitte jamais vraiment les esprits. Elle s’infiltre dans chaque décision, chaque tentative de projection, chaque envie de reconstruire un quotidien stable. Comment investir un lieu, un lien, ou même un souvenir, lorsque tout peut de nouveau disparaître sans prévenir ? L’attente devient une forme de tension permanente, un état de veille intérieure où l’on apprend à ne pas trop espérer, par peur de perdre encore. Cette fragilité transforme le rapport au temps, qui n’est plus un allié mais une menace suspendue. Vivre ainsi, c’est avancer avec prudence, aimer avec retenue, et reconstruire malgré tout, non par certitude, mais par nécessité vitale.
Face à cette réalité, le film de Max Walker-Silverman choisit de ne pas répondre, seulement d’accompagner. Inspiré par les incendies qui ont ravagé le Colorado et par l’entraide née dans l’après, Rebuilding regarde la catastrophe comme un état durable, intégré à la vie. La maison n’est plus un lieu figé, mais un mouvement, une communauté, un soin partagé. Ce qui subsiste, malgré la perte, c’est la capacité humaine à aimer, à imaginer, et à trouver une forme de stabilité non dans ce qui reste, mais dans ce qui renaît.

Pour aller plus loin
La genèse de Rebuilding tient d’abord à une image persistante, presque obsédante, dans l’esprit du réalisateur : celle d’un homme simple, un rancher taciturne, incapable d’exprimer ses émotions autrement que par les gestes. Cette figure existait bien avant le scénario. Elle errait sans histoire précise, jusqu’au jour où le cinéaste comprend qu’elle devait être confrontée non à un drame spectaculaire, mais à un vide durable, à l’impossibilité de « revenir comme avant ». Le second élan lui vient de la manière d’envisage la notion de foyer. En observant des communautés recomposées, faites d’amitiés, de voisins et de solidarités improvisées, il comprend qu’une maison peut exister sans murs stables. Le film naît alors de cette idée centrale : raconter non la perte, mais la lente invention d’un nouvel équilibre, fragile, mouvant, où la famille se redéfinit hors des cadres traditionnels.
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17 décembre 2025 en salle | 1h 35min | Drame
De Max Walker-Silverman |
Par Max Walker-Silverman
Avec Josh O’Connor, Meghann Fahy, Kali Reis
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