James Gunn livre une relecture humaine et lumineuse de Superman, recentrant le mythe sur l’émotion, le doute et la bonté. Si le film séduit par son esthétique rétro, ses clins d’œil et ses personnages secondaires (Krypto, Jimmy Olsen), il peine à émouvoir autant que ses prédécesseurs. On salue l’intention, la sincérité et le soin du détail, mais l’émerveillement n’était pas au rendez-vous. Verdict : un Superman introspectif, mais pas inoubliable. Nous restons cependant curieux de découvrir la suite !
Malgré plusieurs articles publiés en amont, témoignant d’un réel engagement autour du film, nous n’avons pas été conviés à la projection presse. Cette chronique a donc été rédigée en toute indépendance, sans accompagnement studio. Parfois, la cape d’un super-héros ne suffit pas à s’élever au-dessus des logiques d’un système verrouillé. Nous nous efforçons ici de rester les plus factuels possible.
Superman, ultime rempart de la foi en la bonté humaine.
James Gunn ne signe pas seulement une relecture de Superman, il réécrit le mythe à hauteur d’homme. Très tôt dans l’écriture, une scène cristallise sa vision : Superman, blessé, ramené dans sa Forteresse de Solitude par un Krypto maladroit et survolté. Ce moment tendre et presque burlesque pose les bases d’un récit où l’extraordinaire s’enracine dans l’intime. Pour Gunn, l’enjeu n’est pas de rappeler combien Superman est fort, mais combien il est bon — et cette bonté, dans un monde cynique, devient révolutionnaire.
Loin des récits sombres à la Snyder, Gunn choisit une ligne claire, presque rétro, influencée par All-Star Superman de Grant Morrison. Il réduit les pouvoirs de Kal-El : ici, il peut saigner, échouer, douter. Et c’est précisément dans ces failles que le personnage se révèle fascinant. La mise en scène alterne séquences spectaculaires et instants suspendus, parfois drôles, parfois poignants, toujours centrés sur l’humain. Gunn insuffle une atmosphère lumineuse, inspirée de l’imaginaire des années 80 et 90, mais avec la modernité d’une narration introspective et fragmentée.
Le thème de la dualité
Le tournage lui-même reflète cette dualité. La Forteresse de Solitude a été filmée à Svalbard, en Norvège, dans des conditions polaires réelles, afin de capter l’authenticité du froid et de la lumière naturelle. Gunn voulait que les vapeurs d’haleine des acteurs soient réelles, que la glace crisse sous leurs pas. Autre anecdote révélatrice : le chien Krypto, figure aussi drôle qu’attachante, est inspiré du propre chien de Gunn, Ozu, un compagnon cabochard qui lui mordait les pieds. Le réalisme magique du film s’ancre dans ces souvenirs tendres, et parfois absurdes.
Troisième pépite de fabrication : la manière dont les scènes de vol ont été abordées. Gunn et son équipe se sont inspirés des manœuvres d’avions de chasse comme le F-22 pour créer un style de vol viscéral, réaliste, aérien. Les mouvements de caméra donnent l’impression que l’objectif lui-même fend les airs aux côtés de Superman. David Corenswet, qui incarne le héros, a suivi un entraînement spécifique en harnais sur un dispositif surnommé le « diapason », une structure de sept mètres suspendue au plafond qui permettait des mouvements amples et crédibles.
Le Superman de James Gunn ne cherche pas à surpasser ses prédécesseurs. Il cherche à réconcilier. À mi-chemin entre la nostalgie du film de Richard Donner et la modernité des récits post-snap de Marvel, ce film s’impose comme une déclaration d’intention : celle de raconter un monde où l’héroïsme ne réside pas dans la puissance, mais dans le choix constant de faire le bien.
Gunn offre une fresque à la fois spectaculaire et pudique, où les scènes d’action ne sont jamais gratuites et les dialogues — souvent drôles — viennent questionner l’époque. En recentrant Superman sur son dilemme intérieur (être de Krypton ou homme du Kansas), il touche à l’essence même du personnage. Ce n’est plus un dieu en collants bleus, mais un homme qui veut croire en l’homme.
Certains choix narratifs divisent — notamment l’arrivée furtive de Supergirl ou une romance Lois-Clark un peu esquissée — mais ils s’expliquent par la volonté de bâtir une fondation. Gunn ne raconte pas une fin, mais un commencement. Et dans ce cadre, chaque pierre posée, chaque plan, chaque réplique joue sa partition.
Le film regorge également de clins d’œil précieux pour les fans. Le portail de Lex rappelle celui de Stargate, la Forteresse se dote d’un blason des El jamais vu, et les personnages secondaires (Kat Grant, Jimmy Olsen, Krypto) ne sont plus des figurants, mais des rouages essentiels. Et ce souci du détail sert une ambition plus large : faire de Superman non pas un film isolé, mais le socle d’un univers DC renouvelé.
Reste un paradoxe touchant. À la sortie du film, on ne pleure pas comme devant Christopher Reeve, ni ne frissonne comme devant Brandon Routh. Mais on sourit, on rit, et l’on croit, un instant, que l’espoir a encore sa place dans le cinéma de super-héros. C’est peut-être cela, le vrai pari de James Gunn. Et il est, malgré ses imperfections, remporté.
Pour aller plus loin avec le film
On critique beaucoup ce Superman comme trop gentil, trop naïf ! James Gunn a simplement voulu revenir aux sources du Superhéros crée comme véritable boy-scout allant sauver chat et chien, le film montre d’ailleurs cela de manière pertinente, Superman sauve des écureuils, des chats, des chiens !
Le réalisateur explique qu’il a voulu créer un Superman lumineux en réaction à un imaginaire devenu trop sombre dans le cinéma de science-fiction et de super-héros. Selon lui, ces dernières décennies ont été dominées par des univers cinématographiques moroses où le réalisme imposait des héros torturés et désabusés. Il ressentait une absence criante de lumière, de couleur et d’idéalisme, des qualités qui ont pourtant façonné les premières icônes du genre. Avec ce film, James Gunn choisit donc délibérément de raconter l’histoire d’un personnage profondément bon dans un monde qui ne l’est plus, ce qui, à ses yeux, est devenu rare et même subversif.
Ce choix s’appuie sur une conviction simple : la bonté n’est pas naïve. James Gunn insiste sur le fait que Superman n’a pas toujours raison et peut commettre des erreurs. Ce qui le rend humain n’est pas son origine kryptonienne, mais sa foi inébranlable en la bonté humaine, héritée de son éducation par les Kent. C’est cette tension entre puissance extraordinaire et optimisme sincère qui a convaincu James Gunn qu’il tenait une histoire pertinente pour aujourd’hui. Il note qu’il n’y a plus de place au cinéma pour les héros animés par des idéaux simples. Et lorsqu’un personnage semble “bon”, on le tourne souvent en ridicule. James Gunn choisit de revendiquer cette bonté comme un axe narratif majeur, et même comme un geste politique.
Autre motivation : Superman est à l’origine de tout. James Gunn rappelle qu’il est le tout premier super-héros, souvent relégué au second plan derrière Bruce Wayne ou Diana Prince dans les dernières années. Pour inaugurer le nouvel univers DC, il était crucial de repartir du personnage fondateur, non pas pour refaire son histoire d’origine, mais pour réconcilier les différentes époques et réinsuffler un esprit de rassemblement au cœur du mythe.
Enfin, All-Star Superman de Grant Morrison a été une source essentielle d’inspiration. James Gunn a été marqué par cette version d’un Superman bienveillant, pur, enthousiaste, presque enfantin dans sa manière d’espérer. Il s’est reconnu dans cette lecture du personnage, loin de la toute-puissance froide, et y a vu la possibilité d’un récit humain, chaleureux, à rebours des canons de Zack Snyder, sans les contredire, mais en offrant un autre prisme.
Les sources d’inspiration de James Gunn
Krypto, inspiré par le chien infernal de James Gunn
Le chien Krypto a un modèle bien réel : pour concevoir Krypto, James Gunn s’est inspiré de son propre chien, Ozu, adopté dans un refuge. Terrifié par les humains, destructeur, mordeur de pieds, Ozu a été scanné pour créer la version numérique de Krypto. Mais c’est une autre chienne, Jolene, qui a servi de doublure pour les scènes filmées.
Le « diapason », outil secret pour faire voler Superman
Le dispositif du « diapason » : David Corenswet a été suspendu à une immense barre de 7 mètres, surnommée le « diapason », permettant d’imiter des styles de vol variés. Cela a évité un recours excessif aux effets numériques et donné au vol une sensation physique unique.
Un vol inspiré par un avion de chasse
Des inspirations aéronautiques pour le vol : le style de vol de Superman a été calqué sur les manœuvres du F-22 Raptor, un avion de chasse américain célèbre pour sa poussée vectorielle. Cette référence a permis de créer des déplacements réalistes, mais spectaculaires.
Cleveland, berceau historique de Superman
Un tournage à Cleveland, berceau du héros : certaines scènes ont été filmées à Cleveland, Ohio, lieu de naissance historique de Superman, imaginé par Jerry Siegel et Joe Shuster. Une façon de lier symboliquement la fiction à ses origines.
Nicholas Hoult : douceur naturelle, génie du mal à l’écran
Un Lex Luthor en contre-emploi total : Nicholas Hoult, décrit comme doux et discret dans la vie, a été choisi pour jouer Lex Luthor, un rôle de brute manipulatrice. Une transformation saluée par Gunn, qui l’a poussé dans ses retranchements.
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