Late Runner – Bag of Memories


Avec You’re an Animal (Expanded Edition), Late Runner ne se contente pas de prolonger son deuxième album : il l’enrichit, le complète, l’approfondit. Derrière ce projet, on retrouve Asger Tarpgaard, ancien prodige du powerpop danois, désormais artisan d’un indie-pop introspectif, mélodique et résolument adulte. Entre folk lumineux, ballades nu-disco et échos 70’s, cette réédition dévoile une galerie de morceaux inédits, dont Bag of Memories, une ballade estivale chargée de spleen, entre George Harrison, Mercury Rev et l’ombre tendre de Lennon. Une collection qui sonne comme un album à part entière, à la fois élégant et mélancolique, pensée pour ceux qui savent que le passé ne revient jamais… mais qu’on peut toujours l’écouter différemment.

Il flotte dans ce titre une patine familière, quelque chose de feutré, mais viscéral, qui évoque la nonchalance assumée d’Oasis, la mélancolie brute de Lennon ou les fulgurances plus glam et lunaires de certains morceaux de Bowie. Late Runner navigue dans cette zone trouble entre introspection et flamboyance discrète, où chaque arrangement semble porter la mémoire d’une époque sans jamais la plagier. Ce n’est pas de la nostalgie facile, c’est un hommage sincère à une manière de faire de la musique : avec des silences qui comptent, des mots qui résonnent, et une guitare qui ne cherche pas le solo, mais l’émotion juste.


Une boite à souvenir, mais pas que

Il y a dans cette chanson une douceur mélancolique qui ronge doucement, sans violence, mais avec ce genre de lucidité qu’on n’ose pas toujours affronter. Bag of Memories, c’est ce sac qu’on traîne sans vraiment le vouloir, rempli de ce qu’on croyait beau, vrai, ou éternel. Et pourtant, chaque souvenir semble avoir vieilli avant même d’avoir été pleinement vécu. Cette façon qu’a l’auteur de poser la mémoire sur le sable – donc sur l’éphémère – dit tout : ce qu’on garde finit par s’effacer, ou par peser. La chanson ne s’effondre pas dans le regret ; elle habite une forme d’élégance résignée, comme si se souvenir, c’était déjà un acte de deuil.

Ce qui touche ici, c’est cette manière d’exprimer le temps qui passe sans en faire un monstre ou un prétexte. Le passé devient un lieu qu’on traverse, main dans la main avec l’absence. L’émotion n’est jamais criée, elle est contenue, en équilibre fragile entre désillusion et tendresse. Ce n’est pas la colère de ne plus être aimé, c’est le vertige de n’avoir peut-être jamais su aimer vraiment, ou de s’être trop perdu à essayer. La chanson tisse une toile où les rêves sont recyclés, comme s’il n’existait plus rien de neuf à espérer, mais où le simple fait de l’avouer devient une forme d’authenticité. Et cette vérité-là, on ne la hurle pas. On la chante doucement, comme on murmure un dernier souvenir avant de le lâcher pour de bon.


En savoir plus sur Direct-Actu.fr le blogzine de la culture pop et alternative

Abonnez-vous pour recevoir les derniers articles par e-mail.

Un commentaire ça aide toujours !

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.