No Beast, So Fierce est un projet ambitieux du réalisateur Burhan Qurbani, qui transpose l’œuvre classique de Shakespeare « Richard III » dans le Berlin contemporain. Cette adaptation audacieuse utilise le cadre d’une guerre des gangs entre deux familles arabes pour explorer des thèmes universels de pouvoir, d’ambition et de corruption. En replaçant cette histoire dans un contexte moderne, Qurbani cherche à mettre en lumière les dangers de notre époque, notamment les luttes de pouvoir au sein des communautés marginalisées et la violence qui en découle.
No Beast, No Fierce nous dévoile un film sombre explorant la noirceur de l’âme, celle tapie en chacun de nous, animée par le désir d’être aimé et respecté. Mêlant un cadre moderne réaliste à une atmosphère métaphysique et théâtrale, le film revisite Richard III en entrelaçant codes futuristes et esthétiques scéniques pour offrir une vision oppressante où la morale et l’amour n’ont plus leur place. Chacun cherche à survivre, mais personne n’ose se révéler tel qu’il est, sans artifice ni mensonge —à l’exception de Rashida, la plus jeune des York, qui assume sa vérité dans un monde où elle semble ne plus avoir sa place. Présentée comme la méchante, elle n’est pourtant que le reflet d’un entourage tout aussi envieux que calculateur, rivalisant sans scrupule avec ses propres ennemis.
Une héroïne dans un monde d’homme
Le film se concentre sur le personnage de Rashida, une jeune avocate qui gravit les échelons du monde criminel de Berlin. On explore à travers ce film le traumatisme de son enfance et les cicatrices de la guerre qui la hantent. Cette approche permet au réalisateur d’aborder des questions contemporaines telles que les séquelles psychologiques des conflits et la difficulté de s’intégrer dans une société patriarcale. Bien que le film traite de thèmes de pouvoir et de conflit, on a une lecture personnelle et singulière de l’œuvre originale pour la transposer dans une époque à la fois contemporaine et futuriste.

L’influence de Brecht dans un film atypique
On ressent l’influence de Brecht dans certaines séquences usant de manière abondante différentes symboliques. Burhan Qurbani reprend ainsi les codes du théâtre, qui viennent casser le réaliste, donnant un effet étrange, la distanciation. De plus, le film mélange un cadre moderne et réaliste avec une atmosphère étrange, oscillant entre réalisme et surréalisme, ce qui empêche l’identification totale du spectateur aux personnages. La seconde moitié abandonne le réalisme pour un décor symbolique, une tour en ruine, renforçant la décadence morale des personnages. L’usage de la musique, comme chez Brecht, brise l’illusion théâtrale. Si on veut pousser plus loin l’analyse, on a la caméra dynamique et l’historicisation, qui renforcent cette distanciation, invitant à une réflexion critique. La distanciation a un effet sur le spectateur, il le force à se remettre en question et à réfléchir sur l’œuvre. Cela peut à la fois plaire et déplaire, nourrissant l’ambivalence de l’œuvre.
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26 mars 2025 en salle | 2h 30min | Drame
De Burhan Qurbani |
Par Burhan Qurbani, Enis Maci
Avec Kenda Hmeidan, Verena Altenberger, Hiam Abbass
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Une réflexion sur “No Beast, So Fierce – Entre noirceur de l’âme et traumatismes”