Au pays de nos frères – une plongée intime et bouleversante dans le parcours des exilés afghans


Au pays de nos frères, le premier long-métrage des réalisateurs iraniens Raha Amirfazli et Alireza Ghasemi, offre un regard poignant sur la vie des réfugiés afghans en Iran. Le titre évoque ironiquement la fraternité supposée entre Iraniens et Afghans, contrastant avec la réalité difficile vécue par ces derniers.

IN THE LAND OF BROTHERS – A film by Alireza Ghasemi & Raha Amirfazli Produced by Furyo FIlms, Limited Circle and Baldr Film

Un film sur ces anonymes en terres iraniennes

Le film dépeint avec justesse le contexte politico-social de l’Iran, où les réfugiés afghans constituent une main-d’œuvre bon marché, souvent exploitée sous la menace constante d’expulsion. Cette précarité est habilement mise en parallèle avec la vie des chiens errants en Iran, symbolisant la marginalisation et la vulnérabilité des sans-papiers.

Le film aborde également des aspects culturels et politiques cruciaux, comme la célébration du jour des morts en Iran, rituel chargé de signification dans la tradition chiite. Le parcours kafkaïen des immigrés afghans pour obtenir la nationalité iranienne ou tenter de rejoindre l’Europe via la Turquie est minutieusement décrit, illustrant les obstacles bureaucratiques et les risques encourus.

Un film sur la résilience face à l’incapacité à changer le monde

Les réalisateurs dressent un portrait sensible et touchant de personnages incarnant la résilience face à un système immuable. Confrontés à l’impossibilité de changer leur situation, certains choisissent l’exil vers l’Europe dans l’espoir d’obtenir le statut de réfugié, tandis que d’autres s’engagent dans l’armée iranienne, parfois au prix de leur vie. Se battre pour un pays qui n’est pas le sien, mais mourir en martyr. Le film ne dévoile pas l’après des proches d’enfants morts au combat.

IN THE LAND OF BROTHERS – A film by Alireza Ghasemi & Raha Amirfazli Produced by Furyo FIlms, Limited Circle and Baldr Film

Le mensonge, thème central du film, est présenté comme une stratégie de survie et de protection des proches, rappelant la motivation du film Goodbye Lenin. Cette nécessité de dissimuler la vérité pour préserver une certaine stabilité souligne la complexité des situations vécues par les réfugiés. On ment de peur d’être expulsé, on ment pour ne pas accabler ses proches. Le quotidien des réfugiés n’est toujours celui que l’on s’imagine ; certains vont parcourir le monde dans l’espoir du rêve européen, mais une fois sur place, comprendront que la réalité est bien différente. Ils sont là, devant les façades dorées, à attendre des petits boulots, comme ces chiens errants espérant des miettes. Le titre est assez trompeur, frère dans la religion, mais les différentes scènes montrant l’abus des autorités et le chantage à l’expulsion, montre le processus de destruction de l’Être.

Au pays de nos frères se distingue par sa narration habile, entremêlant trois récits sur trois décennies, offrant ainsi une fresque humaine saisissante des luttes intimes et collectives des réfugiés afghans en Iran. Le film réussit à capturer l’essence de leur combat quotidien pour la dignité et l’espoir d’un meilleur avenir, tout en exposant les contradictions d’une société iranienne oscillant entre solidarité proclamée et discrimination effective.

AVP dans toute la France dès le 10 mars 2025


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Note : 4 sur 5.

2 avril 2025 en salle | 1h 35min | Drame
De Raha Amirfazli, Alireza Ghasemi | 
Par Alireza Ghasemi, Raha Amirfazli
Avec Hamideh Jafari, Bashir Nikzad, Mohammad Hosseini
Titre original In the Land Of Brothers

La réalité des réfugiés en Iran

Obtenir la nationalité iranienne est un parcours semé d’embûches, surtout pour les réfugiés afghans. Il faut avoir résidé en Iran au moins cinq ans avec un visa valide, fournir de nombreux documents et prouver une situation financière stable. Seules les personnes majeures, sans casier judiciaire et ayant effectué leur service militaire peuvent prétendre à cette naturalisation, qui dépend en dernier ressort du Conseil des ministres. Pour les Khawari ou toute personne d’origine iranienne, il est nécessaire d’attester d’une lignée paternelle iranienne par des documents ou un témoignage devant un tribunal, parfois accompagné d’un test ADN.

Les familles afghanes ayant perdu un enfant au combat pour l’Iran ne bénéficient pas officiellement de facilités pour l’obtention de la nationalité. Toutefois, une récente réforme permet aux enfants de mères iraniennes et de pères étrangers d’accéder à la citoyenneté, ce qui pourrait en avantager certains. Par ailleurs, l’Iran complique l’intégration des réfugiés en bloquant l’accès au statut de réfugié depuis 2001 et en refusant la naturalisation aux hommes afghans mariés à des femmes iraniennes. Ces restrictions laissent des milliers de familles dans une situation précaire, sans véritable perspective d’avenir.


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