Les Filles du Nil, réalisé par Nada Riyadh et Ayman El Amir, nous plonge dans l’univers méconnu de la communauté copte d’Égypte, offrant une immersion fascinante dans le quotidien d’un groupe de jeunes femmes en quête de liberté. Ce documentaire, tourné sur quatre ans, suit le parcours de ces jeunes filles qui forment une troupe de théâtre de rue dans un village du sud de l’Égypte, rêvant de devenir comédiennes, danseuses et chanteuses.
Le film s’ouvre sur une scène de baignade presque primitive dans le Nil, symbolisant un paradis de sororité et d’espoir. Cette image puissante contraste avec les défis auxquels ces jeunes femmes sont confrontées dans leur société conservatrice. À travers leurs représentations théâtrales, elles abordent des sujets sensibles tels que les mariages précoces, les droits des femmes et la liberté de mouvement, remettant en question les normes sociales qui les contraignent.

Les spectacles de rue et lutte pour la liberté individuelle
Le spectacle de rue et les sketches sur le quotidien jouent un rôle central dans le film, servant de catalyseur pour exposer les problèmes sociétaux profondément ancrés. Les jeunes femmes utilisent leur art pour dénoncer le mariage précoce, une pratique encore courante dans leur communauté. Elles mettent en lumière les restrictions imposées aux droits des femmes, notamment le droit de marcher seule dans la rue ou de porter des pantalons. Ces performances audacieuses révèlent une société où le corps féminin est souvent perçu comme une source de péché, plutôt qu’une expression de liberté individuelle.
La question du mariage précoce est omniprésente dans le film, illustrant la dichotomie frappante entre la vie avant et après le mariage pour ces jeunes coptes. Certaines aspirent à poursuivre leurs études ou à développer leurs talents artistiques, cherchant à se connecter à leur avenir par la musique et l’éducation. Cependant, le mariage est souvent présenté comme une institution contraignante, où de nombreux maris attendent de leurs épouses qu’elles se consacrent exclusivement au foyer. Cette réalité crée une division nette dans la vie des jeunes femmes coptes : la période de relative liberté avant le mariage, et celle, plus restrictive, qui suit. Le désir de ne pas se marier et de conserver sa liberté apparaît comme un défi considérable dans un contexte où les familles restent profondément attachées aux traditions et aux valeurs conservatrices.
Une vie avant et après le mariage
L’un des aspects les plus captivants du film est sa capacité à mettre en lumière cette dichotomie entre la vie avant et après le mariage pour ces jeunes coptes. Le mariage est présenté comme un tournant décisif, souvent synonyme de perte de liberté, où les aspirations artistiques et professionnelles se heurtent aux attentes traditionnelles d’une vie de femme au foyer. Cette réalité est d’autant plus poignante que le film se déroule dans le contexte d’une minorité chrétienne évoluant dans une société majoritairement musulmane, ajoutant une couche supplémentaire de complexité à leur quête d’émancipation.
Malgré la richesse de son sujet, le film souffre parfois d’une certaine monotonie visuelle. Le régime d’images reste relativement constant, avec une prédominance de plans moyens et de caméra épaule, ne reflétant pas toujours l’évolution des situations et la dissolution progressive du groupe initial. Néanmoins, cette approche documentaire basique permet une immersion authentique dans le quotidien de ces jeunes femmes, capturant leurs espoirs, leurs luttes et leurs désillusions avec une sincérité touchante.

Un récit nuancé sur les femmes coptes en Egypte
Les Filles du Nil réussit à transcender le simple récit d’émancipation pour offrir un portrait nuancé et émouvant d’une jeunesse en quête d’identité et de liberté. En suivant le parcours de ces jeunes femmes sur plusieurs années, le film capture non seulement leurs aspirations individuelles, mais aussi les défis collectifs auxquels elles sont confrontées dans une société en mutation.
Malgré quelques faiblesses formelles, ce film documentaire reste une oeuvre séduisante et émouvante qui offre un regard précieux sur la vie des femmes coptes en Égypte. Le film nous rappelle que le désir de liberté et d’expression artistique transcende les frontières culturelles et religieuses, tout en soulignant les obstacles spécifiques auxquels ces jeunes femmes sont confrontées dans leur quête d’émancipation.
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5 mars 2025 en salle | 1h 42min | Documentaire
De Ayman El Amir, Nada Riyadh |
Par Nada Riyadh, Ayman El Amir
Titre original Rafaat Einy LL Sama
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Une réflexion sur “Les filles Du Nil, rencontre avec la communauté Copte”