Le film La Peine de Cédric Gerbehaye offre un regard intime et poignant sur le quotidien des détenus dans les prisons bruxelloises de Saint-Gilles, Forest et Berkendael. À travers une photographie en noir et blanc artistique et des cadrages alternant entre portraits et plans d’ensemble, le réalisateur dévoile la réalité crue de l’enfermement et son impact sur l’identité des prisonniers.

Une immersion totale dans l’univers carcéral
Cédric Gerbehaye, fort de son expérience de neuf ans de vie à proximité des prisons, a obtenu une autorisation exceptionnelle pour filmer pendant six ans l’intégralité des trois établissements. Cette immersion longue lui a permis de capturer l’essence même de la condition carcérale, révélant les fêlures et les espoirs d’une humanité luttant contre sa propre négation.
Le rythme implacable de la détention
Le film met en lumière ce que les sociologues appellent « le double rythme de la détention » :
- La routine quotidienne : Une répétition incessante de gestes imposés par le cadre pénitentiaire.
- L’attente interminable : Le temps long du procès, de la libération, et dans le cas de Forest, de la fermeture de la prison.
Cette dualité temporelle contribue à la destruction progressive de l’identité des détenus, pris entre des journées qui se ressemblent et une perte d’espoir croissante.
Stratégies de survie et résistance
Face à cette réalité oppressante, certains détenus cherchent à préserver leur lien avec le monde extérieur :
- Téléphones clandestins : Malgré les interdictions, des prisonniers tentent de faire passer des téléphones, véritables fenêtres sur le monde extérieur.
- La télévision : Présente dans toutes les cellules, elle joue un rôle crucial, notamment lors d’événements sportifs comme les matchs de la Ligue des Champions.
Cependant, ces échappatoires semblent parfois insuffisantes, la télévision ne montrant qu’un monde qui paraît aussi perdu que la prison elle-même.

Une photographie évocatrice
L’approche visuelle du réalisateur, avec sa photographie en noir et blanc, renforce l’atmosphère oppressante de l’univers carcéral :
- Portraits : Ils capturent l’humanité des détenus, leurs expressions révélant leur lutte intérieure.
- Plans d’ensemble : Ils soulignent l’omniprésence de l’enfermement, les murs et les barreaux devenant des personnages à part entière.
Cette alternance de cadrages permet au spectateur de ressentir à la fois l’intimité des histoires individuelles et le poids écrasant de l’institution.
Au-delà des clichés
« La Peine » va au-delà des représentations stéréotypées de la prison véhiculées par la fiction et les médias. Gerbehaye offre un regard nuancé, montrant que la prison est « le lieu de toutes les projections, de tous les fantasmes », tout en révélant une réalité bien plus complexe.
La Peine de Cédric Gerbehaye est un témoignage puissant sur la condition carcérale en Belgique. À travers son objectif, le réalisateur capture l’essence même de l’enfermement : la lutte quotidienne pour préserver son humanité face à un système qui tend à la nier. En alternant entre l’intime et le collectif, entre l’espoir et le désespoir, le film offre une réflexion profonde sur la justice, la punition et la nature même de notre société. Entre journées qui se ressemblent et perte d’espoir, le film dévoile la destruction progressive de l’identité. Comme dans un acte presque existentialiste, pour échapper à cela, certains vont ne pas respecter les règles en faisant passer des téléphones dernière fenêtre sur le monde extérieur. Le film dévoile le monde et ce monde clos, la quête de sens et ces surveillants voulant survivre à ce lieu qui abime aussi bien les détenus que le personnel encadrant et surveillant.
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5 février 2025 en salle | 1h 30min | Documentaire
De Cédric Gerbehaye |
Par Cédric Gerbehaye, Andrés Peyrot
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Une réflexion sur “La peine de Cédric Gerbehaye, un regard sur l’univers carcéral”