The Substance, la jeunesse éternelle selon Coralie Fargeat


Dans « The Substance« , Coralie Fargeat utilise le corps féminin de manière provocante pour susciter à la fois le désir et la répulsion, créant ainsi une critique acerbe de l’obsession sociétale pour la jeunesse et la beauté féminine.

Le film met en scène des plans rapprochés hyper-sexualisés de parties du corps féminin – lèvres humides, seins fermes, fesses toniques – mimant le regard masculin omniprésent dans la culture populaire. Ces images sont conçues pour évoquer le désir, mais leur exagération pousse le spectateur à remettre en question cette objectification.

The Substance © Mubi Deutschland

Le BODY HORROR à son paroxysme

Parallèlement, la réalisatrice utilise des effets de body horror extrêmes pour provoquer le dégoût. Le film dépeint des injections, des vomissements, des saignements, automutilations et transformations corporelles grotesques. La scène où Sue émerge du dos fendu d’Elisabeth est particulièrement répugnante. Mais il y a une forme de renaissance à travers ce corps

Cette juxtaposition du désirable et du repoussant souligne les conséquences horrifiques de la quête effrénée de perfection physique. Le corps devient un champ de bataille où s’affrontent jeunesse et vieillissement, beauté et monstruosité.

En poussant ces représentations à l’extrême, la réalisatrice force le spectateur à confronter ses propres désirs et peurs liés au corps féminin, créant une expérience viscérale et cathartique qui remet en question les normes de beauté oppressives.

The Substance © Mubi Deutschland

La société produit ses monstres – entre fascination, perversion et sadisme

Avec le film de Coralie Fargeat, il est facile de dresser un parallèle saisissant avec « Freaks » de Tod Browning en montrant comment la société contemporaine fabrique ses propres monstres, tout comme le monde du cirque dans le film de 1932.

Le film critique l’industrie du divertissement et le culte de la jeunesse éternelle, qui poussent les femmes à des extrémités grotesques. Elisabeth Sparkle, incarnée par Demi Moore, est rejetée par son producteur en raison de son âge, ce qui la conduit à utiliser une substance mystérieuse pour créer une version plus jeune d’elle-même.

Cette quête désespérée de perfection physique transforme littéralement les personnages en monstres. La scène où Sue émerge du dos fendu d’Elisabeth évoque une métamorphose horrifique. Où l’on peut se poser des questions sur où somme nous prêt à aller pour faire perdurer l’illusion et aussi se conformer au diktat de la beauté.

The substance ©Working Title

Par le body horror, on illustre les conséquences dévastatrices de cette obsession sociétale. Les corps deviennent des champs de bataille, subissant injections, vomissements et transformations grotesques. Finalement, à base de gros plan, on suscite tantôt le désir, le fantasme et tantôt la répulsion. Un corps souvent montré uniquement pour ses attraits sexuels et non pour un ensemble qui constitue une femme, une personne et un individu. Comme pour s’inscrire dans cette forme de dualité inévitable à la Jekyll and Mr Hyde, où nous avons une belle personne, qui à mesure qu’elle découvre le monde va s’enlaidir dans le cœur. À croire qu’à force de vouloir briller, on épuise sa lumière intérieure.

Comme dans « Freaks« , le véritable monstre n’est pas celui qu’on croit. Ici, c’est la société (et les consommateurs) qui, par ses exigences inhumaines de beauté et de jeunesse, crée ses propres aberrations. Le film dénonce ainsi le « male gaze » omniprésent et le diktat de la perfection physique qui déforment l’image que les femmes ont d’elles-mêmes. Non, passé 40-50 ans, une femme n’est pas terminée !

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Note : 5 sur 5.

6 novembre 2024 en salle | 2h 20min | Drame, Epouvante-horreur
De Coralie Fargeat | 
Par Coralie Fargeat
Avec Demi Moore, Margaret Qualley, Dennis Quaid

Dans The Substance, Coralie Fargeat critique la société en utilisant des images hypersexualisées et du body horror pour souligner l’obsession de la jeunesse et de la beauté féminine. En confrontant désir et répulsion, le film expose les conséquences monstrueuses de la quête de perfection physique, dénonçant ainsi les normes de beauté oppressives.
C’est gore, c’est dérangeant et ce Body Horror nous mène jusqu’au plus profond de notre propre vision de la beauté. Nous sommes tous coupables à notre échelle et de bon spectateur de cette course à la perfection.


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