La réalisatrice indienne Payal Kapadia, originaire de Bombay offre un second long métrage de fiction après son documentaire Une nuit sans savoir (A Night of Knowing Nothing) qui a reçu le prix L’Œil d’or de 2021.
On a beaucoup pensé à In The Mood For Love dans la manière de traiter l’amour et aussi certains clins d’oeil comme les autocuiseurs. Ici, personne ne dit qu’il aime l’autre, mais lui demande de partir avec lui, un peu comme on peut l’entendre dans 2046/In The Mood For Love. Au-delà de ce point commun, on a ici l’illustration de l’Inde encore très conservatrice, du rôle des femmes dans une société. L’enfer de Mumbai, le royaume des désillusions. On nous dévoile également la difficulté pour les musulmans et Hindou à vivre ensemble, du moins pouvoir imaginer une relation sans créer une cascade de reproche des familles.

Les deux cinéastes se concentrent sur les désirs inassouvis et la solitude de leurs personnages. Dans All We Imagine As Light, on explore les désirs multiformes des femmes indiennes – personnels, sexuels, émotionnels et politiques. Cette approche fait écho à la façon dont Wong Kar-wai dépeint la solitude et le désir dans ses films, notamment dans 2046 où les personnages sont hantés par des amours impossibles.
Dans l’univers de la réalisatrice indienne et du réalisateur chinois, l’Amour existe, mais les conventions, la peur ou encore le passé emprisonne les protagonistes. Ils veulent s’enfuir, mais n’y arrive pas, attendant que l’autre fasse le premier pas et les aide à se confronter à la société. Mais comment faire quand chacun d’eux ont peur de prendre la responsabilité du déshonneur ?
Un drame social sur la condition des femmes en Inde Contemporaine
Payal Kapadia offre un portrait nuancé et poignant de la condition féminine en Inde contemporaine. À travers les parcours entrelacés de trois femmes – Prabha, Anu et Parvaty – le film explore avec subtilité les contraintes sociales, religieuses et économiques qui pèsent sur les Indiennes. Prabha, infirmière expérimentée, vit séparée de son mari parti en Allemagne, illustrant la solitude et les attentes pesant sur les femmes mariées. Anu, jeune infirmière, entretient une relation secrète avec un homme musulman, défiant les normes religieuses et les mariages arrangés. Quant à Parvaty, menacée d’expulsion de son logement, elle incarne la précarité économique touchant particulièrement les femmes.
Le film met en lumière la sororité comme source de résilience face à ces défis. Les trois protagonistes trouvent refuge et liberté lors d’un voyage dans un village côtier, loin des pressions de Mumbai. Cette échappée leur permet d’exprimer leurs désirs et aspirations longtemps réprimés. Payal Kapadia dresse ainsi un portrait de femmes fortes et déterminées, luttant silencieusement contre le patriarcat et les inégalités. Sans tomber dans le manichéisme, le film critique finement la société indienne, abordant des sujets sensibles comme les mariages forcés, le système des castes et les tensions interreligieuses. En montrant ces femmes qui s’émancipent progressivement, « All We Imagine As Light » suggère que le changement est en marche, porté par une nouvelle génération d’Indiennes aspirant à plus de liberté et d’autonomie.

ALL WE IMAGINE AS LIGHT est un drame social lent avec beaucoup de délicatesse dans le traitement des relations hommes femmes, dans un monde qui semble bloqué en mode pause hors du temps. Peut-être que nos protagonistes attendent eux-aussi le prochain train pour de 2046 ? Le film est lent, aussi lent et la photographie un peu trop dans une recherche artistique où les scènes de nuits viennent alourdir le propos déjà très pesant. La sexualité est montrée de manière simple et sans détours, peut-être pour éviter de mentir au spectateur sur les sentiments des protagonistes, qui pourtant eux n’osent pas parler clairement dans un monde où les traditions écrasent la liberté individuelle.
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2 octobre 2024 en salle | 1h 58min | Drame
De Payal Kapadia |
Par Payal Kapadia
Avec Kani Kusruti, Divya Prabha, Chhaya Kadam
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Une réflexion sur “ALL WE IMAGINE AS LIGHT – un moment de vie dans le monde des femmes indiennes”