Dragon Ball Z a profondément marqué l’introduction de la culture japonaise en France, révolutionnant le paysage médiatique et culturel dans les années 1980 et 1990.

L’arrivée du manga
Le 8 mars 1988, Dragon Ball fait son entrée fracassante sur les écrans français via le Club Dorothée sur TF1. Cette diffusion marque le début d’une véritable révolution culturelle. Le manga, jusqu’alors peu connu en France, gagne rapidement en popularité. En 1993, les éditions Glénat publient les premiers tomes de Dragon Ball, ouvrant la voie à une nouvelle ère éditoriale. Le succès est tel que la France devient rapidement le deuxième pays consommateur de produits japonais, juste derrière le Japon lui-même.
Un média mal vu
Malgré son succès fulgurant, Dragon Ball Z fait face à de nombreuses critiques. La série est accusée de véhiculer trop de violence et est souvent censurée lors de sa diffusion. Ces controverses reflètent les difficultés d’adaptation de la culture japonaise dans un paysage médiatique français peu habitué à ce type de contenu. Pourtant, cette résistance initiale n’empêche pas la série de conquérir le cœur des jeunes spectateurs.
Le combat du Club Dorothée et AB Production
Face aux critiques, le Club Dorothée et AB Production jouent un rôle crucial dans la défense et la promotion de Dragon Ball Z. Malgré les pressions, ils continuent à diffuser la série, contribuant ainsi à son immense popularité. Leur persévérance permet à toute une génération de découvrir et d’apprécier la richesse de la culture japonaise à travers ce manga emblématique.L’impact de Dragon Ball Z va bien au-delà de la simple diffusion d’un dessin animé. La série a ouvert la voie à de nombreux autres mangas et animes en France, influençant profondément la culture populaire. Elle a inspiré des générations de fans, donné naissance à d’innombrables produits dérivés, et continue d’être appréciée aujourd’hui, traversant les générations. Dragon Ball Z a ainsi joué un rôle pionnier, transformant durablement le paysage culturel français et ouvrant la porte à une appréciation plus large de la culture japonaise dans son ensemble.

AB Productions et le Club Dorothée ont choisi de se tourner vers la culture japonaise pour plusieurs raisons stratégiques et économiques :
Une opportunité économique
AB Productions avait signé en 1987 un contrat avec la toute nouvelle chaîne privée TF1, qui cherchait à remplir ses grilles de programmes à moindre coût. Les dessins animés japonais représentaient une option beaucoup moins onéreuse que les productions françaises ou américaines. Cette décision économique a permis à TF1 de diffuser une grande quantité de contenus japonais à bas prix.
Une offre diversifiée et abondante
Le Japon produisait déjà une grande variété de dessins animés, couvrant de nombreux genres et thèmes. Cette diversité permettait de satisfaire différents publics et de remplir facilement les nombreuses heures de diffusion du Club Dorothée. AB Productions a ainsi acheté en masse des catalogues entiers de dessins animés japonais, offrant une programmation riche et variée.
L’inspiration de Jean-Luc Azoulay
Jean-Luc Azoulay, cofondateur d’AB Productions, avait voyagé au Japon avec Sylvie Vartan et y avait découvert les mangas. Impressionné par ce qu’il avait vu, il s’est demandé pourquoi on ne faisait pas la même chose en France. Cette expérience personnelle a sans doute influencé sa décision de se tourner vers les productions japonaises.
Un pari sur la nouveauté
Contrairement à d’autres pays européens qui se limitaient à des adaptations d’œuvres classiques occidentales, AB Productions a fait le pari d’introduire en France une véritable diversité de dessins animés japonais, incluant de la science-fiction, des robots géants et des combats. Ce choix audacieux a permis à la France de développer une culture manga unique en Europe. Cette stratégie, bien que critiquée par certains, a finalement conduit à une véritable révolution culturelle, faisant entrer « en force » la culture japonaise dans les foyers français et établissant la France comme le deuxième plus grand consommateur de produits japonais après le Japon lui-même.
Dragon Ball est toujours autant populaire, à la Japan Expo plus que jamais présent.
La politique française conservatrice en lutte contre les mangas et animé japonais
Dans les années 1980 et 1990, Ségolène Royal, alors députée PS des Deux-Sèvres, s’est engagée dans une croisade contre les mangas et les dessins animés japonais diffusés à la télévision française. Elle critiquait vivement la violence présente dans ces programmes, particulièrement ceux diffusés par le Club Dorothée sur TF1. Dans son livre « Le ras-le-bol des bébés zappeurs » paru en 1989, Royal dénonçait spécifiquement les mangas, les qualifiant d' »exécrables » et de « terribles ». Elle s’inquiétait de l’impact de ces contenus sur les enfants et proposait même un amendement pour la protection des mineurs contre la violence à la télévision. Cette position a suscité une controverse, mettant en lumière le fossé générationnel entre les adultes méfiants envers cette nouvelle forme de divertissement et les jeunes qui l’adoptaient avec enthousiasme. Malgré ses efforts, la popularité croissante des mangas en France n’a pas été freinée, et ses critiques sont aujourd’hui considérées comme déconnectées de la réalité culturelle de l’époque.
Malgré les critiques virulentes de Ségolène Royal à la fin des années 1980, la diffusion des mangas en France a connu une évolution significative :
Un recul temporaire
Dans un premier temps, les critiques de Ségolène Royal et d’autres personnalités ont eu un impact négatif. Les années 1990 ont vu une diminution de la présence des dessins animés japonais sur les chaînes de télévision françaises, ce qui a été qualifié de « japan bashing ».
Une renaissance progressive
Cependant, ce recul n’a été que temporaire. Dès le milieu des années 1990, on assiste à une renaissance de l’intérêt pour les mangas et les animes en France :
- L’édition de mangas a connu un essor important, avec des maisons d’édition comme Glénat qui ont continué à publier des titres populaires.
- De nouvelles chaînes de télévision, notamment câblées et satellitaires, ont commencé à diffuser des animes, touchant un public plus large et diversifié.
Un phénomène culturel majeur
Au fil des années 2000 et 2010, les mangas sont devenus un véritable phénomène culturel en France :
- La France est devenue le deuxième marché mondial du manga après le Japon.
- Les ventes de mangas ont connu une croissance exponentielle, dépassant même celles de la bande dessinée franco-belge traditionnelle.
- Les conventions et festivals dédiés aux mangas et à la culture japonaise se sont multipliés à travers le pays.

Une reconnaissance institutionnelle
Ironiquement, la culture manga a fini par gagner une forme de reconnaissance institutionnelle :
- Le manga est désormais étudié dans certains cursus universitaires.
- En 2021, le Pass Culture, une initiative gouvernementale, a révélé que les mangas étaient parmi les produits culturels les plus plébiscités par les jeunes.
Cette évolution montre que, malgré les critiques initiales, les mangas ont su trouver leur place dans le paysage culturel français, devenant un élément incontournable de la culture populaire contemporaine.
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