Hors du Temps, La fonction de l’artiste en temps de crise – Comment parler de celui qui n’est plus.


Hors du Temps est un film sur l’Homme face à la pandémie, la place de l’Art et de l’Homme dans la société où la survie prime. Pourtant, il y a un certain émerveillement qui s’installe, on retrouve le temps de découvrir l’insouciance d’antan. Le confinement permettant de vivre dans une instance Hors du temps et de voir les fleurs naitre et disparaitre. Revenir dans un village, une région où l’on a grandi, dans ce lieu qui fait revenir l’enfance.

Plonger dans une ville entre le passé et le présent. Aux différentes maisons de différentes époques du style 1900 à 2000. Les rues et les paysages ont été métamorphosés. Ces lieux sans voisin en Essonne devenu des zones pavillonnaires.

Le style d’Olivier Assayas dans ce film est très prenant. Le souci de détail crée l’émotion, un peu comme le style Vincent Delerm ou même de son père Philippe.
On décrit ces moments paisibles, aussi les angoisses de l’Homme qui se retrouve à ne plus être maitre de sa liberté. S’affronte deux êtres : ceux qui vont suivre à la lettre les recommandations et ceux qui vont chercher à comprendre par eux-mêmes, furieux de cette privation excessive.

Un réalisateur/artiste qui ne réalise/crée plus, peut-il encore être un réalisateur/artiste ?

Quant à son frère, journaliste de rock, dont le style rappelle un peu celui de Manœuvre et d’Olivier Nuc. Il veut continuer à parler de musique, partager la musique. Mais le confinement entrave les directs, le monde devient une forme de rediffusion, piégé dans l’immobilisme. On veut faire oublier le confinement en parlant de choses actuelles, mais le monde lui-même ne pense plus qu’à cela et à la maladie.

Nous sommes loin du film Cleo, Mevil et moi, un film sur l’amour, qui lui montrait le quotidien d’un réalisateur. Ici, nous sommes plutôt dans une recherche existentielle et substantielle de la fonction d’Artiste. Peut-il encore exister lorsqu’on ne lui offre plus l’espace nécessaire pour créer ? Le critique musical a-t-il encore sa place quand les concerts s’arrêtent et que lui demande de faire bonne figure en créant du faux-direct ? La pandémie était un moment obscure où nous avancions lentement sans savoir où nous étions déjà. Une forme légalisée de l’absurde, où nous faisons nos propres autorisations de sortie, où nous devions faire des détours pour rester à vol d’oiseau dans un périmètre.

Le paradoxe : L’immobilité, c’est le néant, car elle ne peut pas être une utopie. On pense que quand la pandémie sera terminée tout reprendra de manière naturelle, mais ce n’est pas comme cela. Le film arrive à traduire ces envies et ces désirs opposés, le renouveau et l’envie de revenir à la normalité.

Cette pandémie, le confinement a construit des couples et en détruit. Les gens qui s’évitaient par la force du travail devaient affronter leurs enfants, leur conjoint(e). Ceux qui ne vivaient pas ensemble prenaient parfois la décision de « se confiner » ensemble, une preuve d’amour ou un test pour voir comment le retour à la normale donnera une nouvelle dimension au couple.

Quelques mots sur le projet :

Le processus de création du film Hors du temps d’Olivier Assayas est profondément influencé par le contexte de la fin du confinement. Olivier raconte qu’il a écrit le scénario de manière impromptue, pendant une convalescence due à une fièvre inexplicable.

Cette période l’a conduit à une écriture spontanée et rêveuse : «J’ai alors commencé à écrire dans cet état flottant, comme une sorte de rêverie.» Le film est né d’une série de scènes autobiographiques et comiques, développées de manière chronologique et intuitive, sans planification rigide. Ces mini-tableaux rappellent énormément ceux du monde du théâtre et littéraire. On parle de la vie en mettant le plus de réalisme possible. Un film intimiste et dévoilant les angoisses de ceux qui vivent et font vivre la Culture, pour la naissance de ce film, Olivier se trouvait dans la maison de son enfance, ce qui a fait surgir des souvenirs involontaires, influençant le contenu et le ton du film : «Cette circulation entre le passé et le présent s’est donc aussitôt imposée.» Cette méthode de création a donné naissance à un film hybride, entre la comédie et la réflexion sur le passé, influencé par des références littéraires et picturales. C’est sa vie, son monde et une représentation réaliste d’un moment étrange, où le monde entier était sur pause, où la vie était hors du temps !

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Note : 5 sur 5.

19 juin 2024 en salle | 1h 45min | Comédie dramatique, Romance
De Olivier Assayas | 
Par Olivier Assayas
Avec Vincent Macaigne, Micha Lescot, Nora Hamzawi

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