May December, une master class sur les méthodes du jeu d’acteur


May December fait partie de ces films qu’on attend, qu’on regarde et qui laisse une impression singulière. Tant sur le plan esthétique que sur la dynamique de la dialectique se cachant derrière le sous texte et la forme très brute du propos.

Todd Haynes connu Dark Waters et The Velvet Underground, nous livre une leçon de cinéma et parvient à créer une ambiance unique. En optant pour le point de vue d’Elizabeth Berry, il dévoile graduellement la vie quotidienne de ce couple d’âges différents, librement inspiré de l’affaire Mary Kay Letourneau.

May December est une expression anglaise faisant référence à une différence d’âge significative au sein des membres du couple ; le premier étant plus jeune et le second plus âgé.

Le retour de Natalie Portman au cinéma

De « Léon » à « Black Swan« , Natalie Portman a tracé une carrière exceptionnelle. Débutant en 1994 dans le rôle marquant de Mathilda, elle a mûri artistiquement. Son interprétation dans « Black Swan » (2010) lui a valu un Oscar. Portman, éblouissante et polyvalente, reste une icône du cinéma contemporain. May December est en quelque sorte, la masterclass de Natalie Portman sur le travail préparatoire d’un rôle, face à Julianne Moore, qui incarne un personnage compliqué et aussi déstabilisant que celui d’Elizabeth.

On suit le quotidien d’une comédienne en préparation d’un rôle complexe. L’attitude d’Elizabeth dans la construction du personnage est comme malsaine, intrusive et presque obsessionnelle. Composer le personnage en essayant de le devenir par tous les moyens, entre névrose et comportement limite déviant, elle se permet d’être partout et viole l’intimité du couple et de leurs amis.

Dans la scène de la salle de bain par exemple, montrant de manière très frontale deux femmes se maquillant. Le réalisateur arrive à soutenir et à partager l’attitude étrange d’Elizabeth, qui observe son modèle comme un objet d’étude.

À mi-chemin de la méthode de Lee Strasberg (Actors Studio), inspirée par Stanislavski, cette méthode met l’accent sur l’utilisation des souvenirs affectifs pour créer des émotions réelles dans la performance. Dans la recherche de la compréhension de la psychologie du personnage et du texte, on a beaucoup d’éléments rappelant la méthode Practical Aesthetics développée par David Mamet et William H. Macy. Elle privilégie l’analyse scripturale et la clarté des intentions du personnage pour guider l’interprétation, différant des approches émotionnelles comme la Méthode Stanislavski. Ici, Elizabeth autopsie l’ensemble de la vie du personnage au point où elle en oublie que le couple est avant tout des êtres humains et non uniquement un sujet d’étude. Elle essaie de trouver du sens dans des éléments de la vie qui parfois n’en ont pas.

Quant à la musique du thème du film «Le messager » (Joseph Losey) composé par Michel Legrand et réarrangé par le compositeur Marcelo Zarvos, elle apporte une dimension lourde et pesante.

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Note : 4 sur 5.

24 janvier 2024 en salle | 1h 57min | Comédie, Drame
De Todd Haynes | 
Par Samy Burch
Avec Natalie Portman, Julianne Moore, Charles Melton


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