Après 26 ans de thérapie, le psy d’Oury meurt brutalement. Depuis, il entreprend la reconstruction du scénario de sa vie et se pose des questions sur le sens de la famille et des liens entre chacun des membres qui la compose.

Le film emprunte son titre à celui d’une chanson du père de la fille qu’il épousa. Enrico Macias. La chanson Pour ton mariage exprime l’amour d’un parent pour sa fille qui se marie. Les thèmes incluent l’amour filial, la fidélité conjugale, le passage du temps, la nostalgie des souvenirs partagés, et les vœux de bonheur pour l’avenir. La chanson évoque des moments heureux du passé, soulignant l’importance de la famille et de la continuité de l’amour à travers les générations. Le ton est empreint de tendresse, de conseils et de souhaits positifs pour le mariage de la fille, symbolisé par un chandelier lumineux. La chanson célèbre l’union tout en reconnaissant le changement et le départ vers une nouvelle étape de la vie.

La question culturelle avant celle religieuse

Le film explore la transition du réalisateur, Oury Milshtein, d’une carrière de quarante ans dans divers rôles cinématographiques vers celui de metteur en scène. Le film émerge de manière spontanée, révélant des motivations profondes après le début de la production. La narration entrelace des thèmes complexes : la relation difficile avec les parents, la quête d’amour et de famille, la judéité, la tragédie de la maladie et de la perte, avec une attention particulière portée à la fille du réalisateur, Léah.

Le film est une exploration sincère et parfois dérangeante de l’intimité familiale, défiant la frontière entre voyeurisme et indécence. L’utilisation d’archives familiales crée une mise en abyme, reflétant la dualité entre passé et présent. La finalité est le résultat d’une introspection cinématographique, offrant une vision honnête et complexe de la vie du réalisateur, de la psychanalyse à la découverte de soi à travers le processus créatif.

Une thérapie par l’image

Durant tout le film, on découvre une forme de thérapie par l’acte de créer un film. Un film cathartique et libérateur où la symbolique des mots a son importance. La discussion avec l’actrice Émilie Caen révèle que les mots libèrent et ont un grand pouvoir pour aller mieux à travers la psychanalyse. Cependant, il faut également passer par le corps pour se libérer des traumatismes.
On parle souvent de malédiction familiale, de la cause juive ou encore de névrose familiale… Mais durant tout le film, on évoque surtout la question de se sentir juif dans un pays où l’on a grandi avec une Culture différente. On dit fréquemment que la France est judéo-chrétienne, mais c’est davantage la part chrétienne qui a su s’imposer au fil des siècles, la communauté juive vit essentiellement en retrait et conserve ses traditions de manière discrète.

L’image du père dans ce film

Il y a plusieurs pères, Enrico Macias, mais aussi celui d’Oury qui est enterré dans une tombe que le réalisateur a payée. C’est à ce moment-là qu’on retrouve la plus belle symbolique du film en découvrant que le psy décédé repose dans une tombe, mais que la tombe que visite Oury chaque semaine est celle de son père. Le dialogue avec le père, figuré par le psy décédé, devient une thérapie symbolique dans le film.

En quelque sorte, la tombe payée par le réalisateur représente le lien émotionnel perdu. Oury dialogue avec l’absence pour redonner du sens à sa vie et reconstruire sa relation familiale.

Le film aborde également la dimension universelle de la quête identitaire et de la réconciliation avec le passé. La judéité du réalisateur est explorée de manière non conventionnelle, oscillant entre une connexion intellectuelle et culturelle plutôt qu’une adhésion religieuse stricte. Cette approche reflète la complexité de l’identité juive contemporaine, où la tradition et la religion coexistent avec des valeurs laïques et une ouverture à d’autres cultures.

La narration du réalisateur sur son expérience au kibboutz à un jeune âge apporte une dimension unique à la compréhension de son identité, évoquant un refuge libérateur loin des complexités familiales. La manière dont le film intègre des moments difficiles, tels que la relation avec ses parents et la perte tragique de sa fille, offre une méditation poignante sur le deuil, l’amour, et la manière dont ces expériences façonnent notre compréhension de soi et des autres.

En dehors des conventions pour dévoiler l’intime

Le film se distingue par sa forme cinématographique non conventionnelle, résultat d’un processus intuitif et spontané. L’utilisation d’archives familiales crée une texture temporelle unique, capturant des instants de vie à différentes époques. Le film est comme une conversation avec lui-même, mais aussi avec tout fils arrivé à un certain âge, se demandant quel est l’héritage qu’il va laisser sur la Terre et à ses descendants. Cette conversation ressemble un peu à la psychanalyse ou thérapie dynamique où les associations d’idée et le cours de la pensée permettent peu à peu d’arriver à une solution ou une explication de l’origine d’un problème.

Oury Milshtein opte pour un montage organique, basé sur les discussions spontanées lors des dîners familiaux, soulignant ainsi l’importance de l’honnêteté et de la sincérité dans son processus créatif. La mise en abyme des dîners où le film du mariage est présenté aux ex-femmes et aux enfants offre une réflexion sur la construction de la mémoire et la manière dont les événements passés résonnent dans le présent.

Le film est une approche sans compromis du réalisateur envers la représentation de sa vie privée. Avec sa manière de montrer les choses, il crée un film intime et révélateur qui défie les conventions, laissant une empreinte puissante sur la compréhension de l’art cinématographique en tant que moyen d’expression personnelle et de catharsis.

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20 décembre 2023 en salle / 1h 19min / Documentaire
De Oury Milshtein
Par Oury Milshtein
Avec Oury Milshtein, Enrico Macias, Émilie Caen